Ana Carla Maza garde son violoncelle sur scène et ne mise pas seulement sur sa belle voix. L’artiste cubaine de 29 ans tient à montrer que les femmes aussi peuvent composer. Sa générosité aussi explosive que rigoureuse sera captivante, à Tronget, jeudi 9 mai.
S’inspirant des riches traditions musicales des Caraïbes, Ana Carla Maza connaît un succès grandissant. Et si son dernier album, qu’elle a entièrement composé, a été écrit pour six instruments, sa version sur scène, en trio, conquiert aussi le public.
EntretienPropos recueillis par Stéphanie Ména
Vous avez produit votre dernier album, le troisième, « Caribe ». Pourquoi cette envie de maîtriser toute l’écriture ?« Je n’ai pas étudié une seule compositrice pour violoncelle lors de mes études. On est que 6 % de femmes instrumentistes et 2 ou 3 % de compositrices. L’idée est trop répandue qu’une femme serait juste faite pour chanter. C’est pour ça, c’est important pour moi d’être sur scène avec mon violoncelle. Et en produisant l’album, j’ai montré qu’on était capable de tout faire, comme les hommes. J’ai envie de transmettre cette idée aux prochaines générations. »
Vous avez écrit cet album lors de la tournée précédente de l’album « Bahia ». Comment faites-vous le grand écart entre l’énergie que demande la scène et la solitude qu’exige la composition ?« J’étais très heureuse du succès de Bahia. On a fait environ 150 concerts, dans 15 pays, on a pris l’avion, le bus… Quand tout le monde dort, c’était mon moment pour écrire. J’ai aussi un rituel tous les matins, d’écrire trois pages, ce qui me passe par la tête, sans objectif, ça permet de se connecter.
Quand une mélodie arrive dans la tête il faut être prête à la saisir, comme un oiseau qui arrive. Donc la nuit, j’ai développé ces mélodies en écrivant la partition pour chaque instrument, voix, saxo, trombone, percu, piano… Il faut de la persévérance dans ce métier et une bonne hygiène. Je ne bois pas, je ne fume pas, je fais du sport. C’est une discipline, ce sont des sacrifices. Mais c’est pour donner le mieux de soi à chaque concert parce que le public le mérite.
Je veux donner l’allegria, partager une soirée inoubliable. J’ai toujours su que je voulais voyager et rencontrer d’autres cultures. »
Durant votre concert à Tronget jeudi 9 mai, vous jouerez exclusivement votre nouvel album ou des chansons des anciens ? « Surtout Caribe, un merengue de République dominicaine, un reggae de Jamaïque, une samba du Brésil. De l’album Bahia, on joue la chanson du même nom, où on est tous levé en train de chanter, et le tango en hommage à l’argentin Astor Piazzola. Je précise que ce n’est pas Bahia, la ville du Brésil, mais Bahia près de Cuba. J’aime le rapport au temps simple et suspendu à Cuba, la température, la mer, les palmiers, le bon air, la joie d’être avec ses proches. »
Coulisses. Cet entretien s’est déroulé en français : Ana Carla Maza, a rejoint le conservatoire de Paris à 16 ans. Après dix ans de résidence à Paris, elle vit à Barcelone. Ses parents ont quitté Cuba pour l’Espagne quand elle avait 11 ans.