Le 25 novembre dernier, la tension qui régnait depuis trois ans dans le village de Chaumont, commune de Boisset, a atteint un point de non-retour lorsqu’un homme âgé d’une quarantaine d’années, qui réside dans l’ancienne école du village avec sa mère, a frappé un conseiller municipal de la commune.
L’élu était venu pour retirer un panneau d’interdiction de stationnement posé sur la voie publique par le prévenu. S’attendant à ce que la situation dégénère et provoque des insultes, la femme de l’élu local a filmé la scène. La séquence dure un peu plus d’une minute. On voit le conseiller municipal retirer le panneau alors qu’une voix féminine l’accuse de « vol » et le traite « d’ordure ». Tout à coup, le mis en cause sort de son logement pour réclamer l’objet. Le ton monte entre les deux hommes. Très vite, le locataire gifle le conseiller et le bouscule contre son véhicule. La vidéo s’interrompt avant de filmer le conseiller mordre la main de son agresseur. « Ce qui pourrait sans difficulté être considéré comme de la légitime défense », a réagi le ministère public. Une incapacité totale de travail de 3 jours a été prescrite à l’homme agressé, marqué d’ecchymoses.
Six mois après les faits, le mis en cause a livré sa version des faits. « Nous sommes stigmatisés ma mère et moi. On cherche à partir depuis longtemps, mais ce n’est pas évident, on se retrouve coincés là. J’avais acheté le panneau, la veille, 8 euros, alors je voulais le récupérer, mais avec ma pathologie, c’est parti. »
On constate une forte augmentation de l’agressivité envers les élus
Le prévenu est diagnostiqué et traité pour des troubles de schizophrénie paranoïde depuis l’adolescence. L’expert psychiatre a d’ailleurs retenu l’altération du discernement au moment des faits, mais pas l’abolition, ce qui rend le prévenu accessible à la sanction pénale. Lui et sa mère perçoivent pour seul revenu l’Allocation aux adultes handicapés (AAH).
Dans sa plaidoirie pour les parties civiles, Me Maria-Luisa Martins Da Silva, avocate du conseiller municipal - soutenu au Palais de justice par le maire de la commune André Poncet et le président de l’Association des maires de France en Haute-Loire (AMF 43) Bernard Souvignet - s’est attardée sur le contexte. « Dans le village, la situation est tendue depuis l’installation du prévenu et de sa mère. La commune a d’ailleurs engagé une mesure d’expulsion. Il y a eu une pétition signée par le voisinage pour que ces deux locataires quittent les lieux. »
Le président de l’AMF 43, Bernard Souvignet, s’est constitué partie civile « car on constate une forte augmentation de l’agressivité envers les élus, mais c’est la première fois que cela va jusqu’à l’agression physique dans notre département. Il faut marquer le coup pour montrer que l’on n’accepte pas les attitudes comme celle-là. »
Les élus de Haute-Loire se forment face aux agressions
Le délit de violence sur une personne chargée de mission de service public est puni d’une peine d’emprisonnement qui peut aller jusqu’à 3 ans d’emprisonnement. La vice-procureure Marie Moschetti a « tenu compte de l’altération du discernement » lorsqu’elle a requis une peine de « 6 mois de sursis, une amende de 500 euros et la participation, à ses frais, à un stage de citoyenneté ».
« Ils (le prévenu et sa mère NDLR) sont devenus les boucs émissaires du village que l’on accuse sans preuve, dans une pétition, d’empoisonner un chien, de jeter des tessons de bouteille dans les chemins ou encore de voler du bois la nuit. Cela fait 3 ans qu’ils subissent l’injustice par la vindicte populaire c’est pour cela que la situation a débordé ce jour-là », a plaidé Me Nicolas Hilaire.
Le tribunal a prononcé la culpabilité du quadragénaire et l’a condamné à une peine de 6 mois de prison avec sursis simple. Il devra suivre un stage de citoyenneté et verser 1.800 euros au conseiller municipal agressé au titre de ses préjudices, mais également pour la prise en charge de ses frais d’avocat. Il devra également verser 1 € symbolique à l’AMF 43.
Céline Demars