Prouver que le monde ne s’arrête pas quand on est paraplégique. C’est la mission que s’est donnée Benoît Bravard, en fondant l’association Minusvalidos, en 2019. Le prouver à ses parents pour commencer, lorsque, malgré leur insistance, il refuse de revenir vivre au domicile familial, après l’accident qui l’a privé de l’usage de ses jambes.
D’emblée, Benoît se qualifie comme quelqu’un de "têtu". "Quand j’ai quelque chose en tête, je fais tout ce qui est en mon pouvoir pour l’obtenir." Cela a peut-être à voir avec son nom, Bravard, dont la racine occitane signifie "sauvage, dur". Un état d'esprit obstiné qui a permis au quarantenaire de reprendre le dessus face aux épreuves que la vie lui a imposées. En particulier son accident de moto, qui lui a laissé des séquelles irréversibles.
Paraplégique à 25 ans après un accident de motocrossDepuis l’enfance, Benoît Bravard a toujours eu un attrait pour le sport. "Surtout le vélo et la moto." C’est donc tout naturellement qu’il enchaîne les compétitions de motocross, dans ses jeunes années. Et qu’il prend le départ d’une course à Vic-le-Comte, l’année de ses 25 ans.
Mais une chute lors de cette course va tout changer dans la vie de cet Ambertois de naissance. "Lorsque je suis tombé, le concurrent de derrière n’a pas eu le temps de s’arrêter. Il m’est rentré dans le dos." Fracture de la colonne vertébrale avec section de la moelle épinière. Le diagnostic est posé. Ainsi que celui, inexorable, de la paraplégie.
Les médecins m’ont dit dès le réveil que je ne remarcherais pas. Mais je voulais leur prouver qu’ils avaient tort.
Alors, trois semaines plus tard, dès sa sortie de l’hôpital, Benoît se lance dans la rééducation. Et pendant un an, il gardera l’espoir de remarcher un jour. "Seulement, quand au fil des semaines rien ne change, on est bien forcés de se rendre à l’évidence." Les médecins avaient raison : il ne remarchera pas. Mais pas question pour Benoît de se lamenter sur son sort. "Je me suis dit : 'j’y vais. À 25 ans, il m’en reste encore un peu.'"Benoît et Olivier sont notamment intervenus dans le cadre de la semaine paralympique organisée au sein du groupe scolaire Potier-Marcus, à Lezoux. Alors il repense sa vie différemment. En se concentrant sur ce qu’il peut faire de ses bras et de sa tête. Et c’est comme ça qu’il avance. Il rencontre sa compagne aide-soignante lors de ses séances de rééducation, avec qui il aura deux enfants. Ainsi qu’Olivier Soudière, qui devient l’un de ses plus proches amis.
Une association pour sensibiliser au quotidien"On s’est rencontrés à Clermont-Ferrand, parce qu’on faisait du rugby fauteuil ensemble. De là, l’association Handischool nous a proposé de faire des interventions pour sensibiliser les écoles au handicap." C’était en 2010. Benoît reprend dans la foulée un emploi, en tant que prestataire de services, grâce à une rencontre là aussi lors d’une séance de handisport. Avec un de ses collègues de travail, Olivier et lui multiplient les interventions de sensibilisation et de handisport du côté de Châteauroux. Puis en 2019, Benoît quitte son emploi pour s’occuper de son fils qui vient de naître. Et en parallèle, il s’associe avec Olivier pour créer l’association Minusvalidos, basée à Clermont-Ferrand.
On voulait vraiment intervenir sur notre territoire et ajouter une partie 'vie quotidienne' à nos sensibilisations. En gardant bien sûr des ateliers de handisport.
Montrer que la vie en situation de handicap impose bien plus de difficultés que ce que l’on croit. Et comment le sport leur a permis de revivre socialement. Des causes qui tiennent à cœur aux deux hommes.
"On a commencé par le lycée Amédée Gasquet, à Clermont. On faisait des ateliers toutes les semaines, en montrant la manière dont on se déplace lorsque l’on est en fauteuil, celle dont on conduit, dont on doit s’adapter pour ouvrir les portes, etc."
Plusieurs interventions dans les établissements scolairesAprès une pause dans leur activité, la faute au Covid, les deux membres de l’association ont continué leur mission de sensibilisation dans les écoles du département. Ils y organisent également des sessions de handisport. "Travailler avec des enfants, c’est génial. Ils sont sans filtre, et ne nous traitent pas différemment juste parce qu’on se déplace en fauteuil."Benoît s'occupe davantage des ateliers de handisport. Désormais, Benoît et Olivier souhaitent développer les missions de Minusvalidos, en sensibilisant aux handicaps invisibles. "C’est important de parler du handicap sous toutes ses formes. Sans gêne. De faire comprendre que non, la vie ne s’arrête pas même si l’on a perdu l’usage d’un de ses membres." Un beau message d’espoir.
Bravard ne serait-il pas aussi la racine de "brave"??
Fanny Rodriguez