Depuis plus d’un an, la commune de Cosnac, près de Brive, tente de lutter contre les dépôts sauvages d’ordures, sur un chemin privé. Mais, faute de mettre la main sur tous les responsables, le nettoyage repose sur les propriétaires.
D’abord, au début du chemin, il y a un premier tas, des sacs-poubelles contenant des vêtements et des cahiers scolaires qui recouvrent des briques sauvagement déchargées. Au sommet, un vieux matelas surplombe l’ensemble, juste à côté de la clôture d’une maison. Quelques mètres plus loin, sur ce chemin du Pré Poma à Cosnac (Corrèze), où l’on entend couler un ruisseau dans le bois, se dresse un nouveau tas d’immondices : des cagettes en bois et en plastique, quelques pièces mécaniques aussi.
"Propriété privée. Décharge interdite"« Dessous, il y a une trentaine de parechocs de voitures, mais on ne les voit plus, car la végétation a tout recouvert », explique notre guide, qui préfère rester anonyme.
Autrefois, ici, des jardins ouvriers dessinaient l’espace. Aujourd’hui, la végétation anarchique a effacé les traces de ces parcelles laissées à l’abandon. Devant nous désormais, un troisième tas en bord de forêt : des plaques en fibrociment. Puis un quatrième : des pneus.
Derrière celui-ci, un panneau indique, avec ironie semble-t-il, « Propriété privée. Décharge interdite ». « Dans ce bois, il y a des animaux, des salamandres, des renards », nous explique-t-on.Au milieu de la végétation, et a quelques mètres d'un ruisseau, des pneus
Notre guide du jour n’est pas le seul à avoir dressé ce triste constat sur ce chemin de Cosnac, près de Brive. Mickaël Vaz, ancien habitant du chemin, a tenté pendant des mois de faire bouger les choses pour voir ces dépôts sauvages être évacués.
S’il a aujourd’hui déménagé et quitté ce cul-de-sac encombré, il en garde un goût amer. « Le calvaire a duré pendant cinq ans. J’ai donné des photos de gens qui venaient déposer leurs ordures, mais rien n’a bougé. Au moment de vendre ma maison, cela a été très difficile », déplore-t-il.
Des blocs en béton et des caméras de surveillanceDu côté de la mairie, le problème est bien connu. Le premier adjoint est même directement concerné puisqu’une partie des dépôts sauvage ont lieu sur son terrain. « Nous avons prévenu la préfecture et le sous-préfet, explique Gérard Soler, le maire de Cosnac. Pour lutter contre le problème, nous avons mis un panneau sens interdit. Puis, nous avons mis des blocs en béton et nous avons installé des caméras de surveillance, pour dissuader les auteurs de ces dépôts sauvages. »
Mais ces réponses pour éloigner les personnes peu soucieuses de l’environnement ont eu un effet très limité. Les blocs de béton ont dû être retirés, car ils gênaient le passage des riverains. Quant aux caméras de surveillances, elles ont permis d’identifier des responsables, « mais dès qu’elles ont été retirées, les dépôts sauvages ont repris huit jours après », nous indique Guillaume Pélissier, l’adjoint au maire concerné.Un tas de taules en fibrociment a été déposé illégalement. Photo Stéphanie Para.
Ce dernier a déposé plusieurs plaintes. « Nous avons la plaque des camions de BTP qui ont déversé des remorques entières. De même, l’identité de la personne qui a effectué le dernier dépôt, a été retrouvée dans les poubelles. Mais nous n’avons pas de réponse des forces de l’ordre », déplore l’élu cosnacois.
Selon la gendarmerie, deux personnes habitant Brive auraient été identifiées. Le dossier aurait été transmis au commissariat de Brive. « Moi, je voudrais que les gens viennent ramasser ce qu’ils ont déposé. C’est tout », explique Guillaume Pélissier.
Pour Cathy Mazerm, présidente de Corrèze environnement, « la mairie de Cosnac a fait ce qu’il fallait faire, mais ce genre de procédure peut être longue ». Une longueur sur le plan judiciaire qui, sur le terrain, se traduit par un sentiment d’impunité pour les responsables, et d’injustice pour ceux qui subissent.
Une mise en demeure « à regret »Faute de faire payer les auteurs du dépôt, les propriétaires des terrains concernés se retrouvent sous la menace d’une sanction. Le maire adjoint de Cosnac a donc reçu une injonction de la mairie, pour faire nettoyer sa parcelle. La mise en demeure pose l’ultimatum au 1er juin.
« C’est triste d’en arriver là, mais si rien n’est entamé avant cette date, nous serons contraints de faire venir une entreprise de nettoyage, à la charge du propriétaire, alors qu’il n’y est pour rien », déplore Gérard Soler.
À moins que la solution ne vienne de Corrèze environnement. « Peut-être qu’en lançant un appel, imagine Cathy Mazerm, une opération pourrait être menée avec des bénévoles. Cela aura la vertu de sensibiliser en même temps les esprits. » L’idée est lancée…
Pierre Vignaud
