Chaque année, un questionnaire est adressé aux entreprises pour connaître leurs besoins en recrutement par secteur d’activité et par bassin d’emploi. Cette enquête de Besoins en main-d’œuvre (BMO) est réalisée par France Travail. Mais à quoi sert-elle ?
Nathalie Halot est directrice de France Travail pour le Puy-de-Dôme, l’Allier et le Cantal. Elle a répondu à nos questions.
À quoi sert cette enquête de besoin de main-d’œuvre ?
Cette enquête fournit des informations essentielles pour les employeurs, les demandeurs d’emploi et les acteurs du marché du travail. Elle permet d’anticiper les difficultés de recrutement. Chaque année, nous interrogeons les entreprises pour identifier les secteurs et les métiers où les employeurs rencontrent des difficultés pour trouver des candidats. Elle aide aussi à anticiper les besoins en personnel et à prendre des mesures pour combler ces lacunes. Pour France Travail, cela nous permet d’améliorer l’orientation des demandeurs d’emploi vers des formations ou des métiers en adéquation avec les besoins réels du marché du travail. C’est aussi un moyen d’informer sur l’évolution du marché du travail et les métiers porteurs pour permettre à tous de prendre des décisions éclairées concernant leur carrière.
Qu’est-ce qui vous a surpris dans les résultats 2024 pour le Puy-de-Dôme ?
Les déclarations des entreprises qui ont répondu à l’enquête sont conformes à l’image que nous avons du marché de l’emploi local. On sent le ralentissement de l’activité. Je suis peut-être surprise de trouver dans le top 10 des métiers les plus recherchés celui de secrétaire bureautique. Avec 360 projets de recrutements, c’est le septième métier le plus recherché par les entreprises. C’est une piste de travail pour nous, pour mettre en place plus de formations et proposer plus de profils aux recruteurs . En revanche, je suis surprise des déclarations des entreprises de l’industrie. En 2023, elles estimaient que sept offres d’emploi sur dix allaient avoir du mal à trouver un candidat. En 2024, c’est une offre sur deux.
Vous avez une explication ?
L’enquête de besoin de main-d’œuvre est déclarative. Elle est quantitative quant aux nombres d’intention d’embauches et un peu plus qualitative en ce qui concerne les prévisions de difficultés à recruter. Un mixte entre les difficultés rencontrées en 2023 et une extrapolation sur 2024. Les métiers de l’industrie sont en tension depuis plusieurs années et beaucoup d’efforts ont été faits pour mieux aligner les compétences des demandeurs d’emploi avec les besoins des entreprises. Les employeurs estiment que cela porte ses fruits, réduisant ainsi les difficultés de recrutement. Il y a aussi eu des améliorations dans les conditions de travail ou des ajustements salariaux qui peuvent avoir rendu les postes proposés plus attractifs, facilitant ainsi les embauches. Et les entreprises ont aussi appris à recruter autrement. Sans CV, en participant à des dispositifs comme le Stade vers l’emploi ou Recrute ton boss.
Que penser de ce paradoxe : les chiffres du chômage sont à la hausse et beaucoup de métiers sont en tension ?
C’est un écart d’adéquation entre les compétences des demandeurs d’emploi et les attendus des employeurs qu’il nous faut résoudre, par la formation, en améliorant la mise en place de l’accompagnement des demandeurs d’emploi et le suivi individualisé et en multipliant les partenariats entre tous les acteurs de l’emploi… C’est tout le sens de la réforme France Travail. Après, il y a aussi d’autres facteurs d’explication, notamment sur les chiffres du chômage.
Par exemple ?
Nous étions presque en plein emploi avec un taux de chômage à 6,6 %, et même 6,1 % au 4e trimestre 2022… Des personnes en recherche d’emploi, particulièrement sur des métiers en tension, ne s’inscrivaient pas nécessairement au chômage. Aujourd’hui, l’activité économique ralentit, le contexte change, les personnes ayant les compétences sont déjà en emploi… Cela peut inciter les personnes à s’inscrire, particulièrement les jeunes, avec + 0,8 % d’inscription en plus sur un trimestre et 5 % sur un an.
Cécile Bergougnoux