Depuis 43 ans, Gilles Pégourier tient bon la barre de la librairie indépendante Ventadour. Dans sa boutique, tous les amateurs peuvent trouver un livre à leur goût.
Le bonhomme est solide, avenant, toujours un bouquin à la main. Il a ouvert en décembre 1981 la librairie Ventadour. Quarante-trois ans de présence au cœur d’Ussel, sur la butte où se trouvait le château des ducs de Ventadour tombé en ruines au XVI e siècle. À deux pas, la maison ducale éponyme.
« J’ai toujours aimé lire et toujours vécu dans un univers de livres. Nous avons pensé qu’il y avait une place pour quelque chose de plus littéraire. Et ça a tout de suite marché ! », se souvient Gilles Pégourier en tournant les pages d’un des derniers ouvrages reçus.
Une passion partagée par sa femme Anne-Marie. Elle tenait une boutique de chaussures dans la rue piétonne à 200 mètres et comme lui, elle avait toujours un livre à la main, entre deux clients.
Quand il a créé sa li- brairie, existait à Ussel Le Papyrus. LA librairie-papeterie historique, où les familles faisaient la queue à chaque rentrée en septembre pour acheter fournitures scolaires et livres de classe. « Nous avons vécu en parallèle et en très bons termes pendant 25 ans », explique-t-il en souriant. « Puis nous nous sommes retrouvés seuls quand la dame est partie à la retraite. »
Avec Mymylibri, installée depuis presque 2 ans dans le centre-ville, ils sont les seuls libraires indépendants de la ville. Une « espèce en voie de disparition » face aux grandes surfaces. La librairie indépendante qui a eu sa fête nationale et locale à la mi-avril.
L’aménagement intérieur de la Librairie Ventadour est original, sur plusieurs niveaux. Un apparent capharnaüm en réalité bien organisé. Dans l’entrée, des livres régionaux jouxtent un rayon scientifique ; au fond, des classiques d’hier et d’aujourd’hui. Pour y accéder, il faut longer des tables chargées d’ouvrages récents. Quelques marches à descendre et le visiteur accède au domaine de la jeunesse. « À l’époque, j’en avais moins. Aujourd’hui, je suis plus moderne dans mon offre », constate Gilles Pégourier.
Direction ensuite le sous-sol, où il a dressé ses bandes dessinées, ses livres de poche, romans et livres historiques. Encore quelques marches et le curieux est entouré de sculptures et de livres d’art.
« La lecture est un phénomène de résistance individuelle »De ses 43 ans d’immersion dans le monde des livres, notre homme tire des enseignements. D’abord, la fidélité à des auteurs qui ont des racines corréziennes. À Pierre Bergounioux, professeur, écrivain et sculpteur est né à Brive, la critique littéraire le qualifie « de figure majeure des lettres françaises ». À Richard Millet ensuite. Né à Viam, il est l’auteur de plus de 80 romans et essais, dont plusieurs ont comme cadre la Corrèze. « Je les accompagne dans leur parcours d’écrivains en leur donnant une place dans mon petit espace », constate en souriant Gilles Pégourier.
Une clientèle fidèleSa clientèle aussi est fidèle, apprécie-t-il. « Des Ussellois, des Corréziens, mais aussi des gens qui ont des attaches corréziennes alors qu’ils vivent à Paris ou loin d’ici. Ils viennent à la librairie à chaque fois. »
Il en tire une analyse sur l’évolution de la lecture, devenue un phénomène de « résistance individuelle, moins ancrée dans le quotidien des gens dans une société submergée par les écrans ».
Il conclut, décochant la flèche du Parthe : « J’ai une petite dent contre les élites sociales. J’en vois peu ici. Cela a fait 15 ans que je n’ai pas vu un seul sous-préfet à la librairie. Ce n’était pas le cas avant. » L’invitation est lancée depuis l’une des deux places fortes de la librairie indépendante à Ussel.
