Dans l'attente d'une réforme économique du secteur, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) en Limousin participe à l'organisation d'une grande journée de mobilisation des pharmaciens le 30 mai prochain.
L'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO) et la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France appellent à une journée de mobilisation massive des pharmaciens le jeudi 30 mai. Une grève des gardes est également prévue le week-end de la Pentecôte, du 18 au 20 mai.
Négociations avec la CNAM le 14 maiCette action d'envergure, pour laquelle toutes les officines sont invitées à baisser le rideau, s'inscrit « dans un contexte où les menaces de dérégulation, les difficultés économiques croissantes et les pénuries de médicaments persistent sans réelle amélioration », explique l'USPO dans un communiqué.
Ce qu'il ressortira de la plénière des négociations avec l’Assurance maladie le 14 mai prochain, visant notamment à « améliorer les mesures de sauvegarde des pharmacies rurales » implantées sur les « territoires fragiles » sera décisif pour déposer un préavis de grève « si la profession n'est pas entendue », prévient la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF).
Les « petites officines » du territoire en difficultéLa FSPF, majoritaire en limousin, porte le mouvement sur le territoire, qui compte à ce jour 146 pharmacies en Haute-Vienne, 92 en Corrèze et 56 en Creuse.
Les représentants départementaux du syndicat tirent la sonnette d'alarme sur le risque d'un désert pharmaceutique.
« En Limousin, face à la perte des habitants, les officines sont plus petites que la moyenne nationale, et sont implantées dans un territoire déjà touché par le désert médical. Comme pour les médecins, nous avons un problème d'attractivité. »
« Les difficultés auxquelles font face les pharmacies n'arrangent pas la situation. Un jeune qui s'installe dans nos campagnes peut facilement travailler 40 à 50 heures par semaine. »
Les pharmaciens pointent le manque de rentabilité de leur officine : revalorisation des salaires (+ 10%) sur les trois dernières années pour compenser l'inflation, augmentation des charges, hausse des tarifs de certains médicaments fixés par les laboratoires, marges réduites, trésorerie fragilisée.
« Dans ce contexte, une pharmacie ferme chaque jour en France. Le nombre des pharmacies est passé en dessous de la barre des 20.000 l'an dernier, pointe Marion Lemaire, coprésidente de la FSPF en Haute-Vienne. Sur le département, neuf pharmacies ont fermé depuis 2015, faute de repreneurs. »
Les honoraires et la vente de médicaments, principale source de revenus en LimousinEn centre-ville de Limoges, la pharmacie du Grand Théâtre, implantée depuis 1898, a fermé au mois de janvier. Deux autres pharmacies, Philipparie rue des Arènes, et Roussenque, rue Armand-Dutreix, ont fermé en 2022.
Le cabinet du mandataire judiciaire Urbain Associés installé à Limoges observe la dégradation économique des officines, au jour le jour. « En Haute-Vienne, quatre pharmacies implantées en zone rurale sont actuellement en difficulté. Dans certains cas, un groupement des pharmaciens rachète l'officine vouée à fermer sur leur secteur, sans la rouvrir. Cela n'a pas d'incidence s'il y a suffisamment d'officines sur la commune. Mais il faut se rendre à l'évidence. Le secteur a profondément changé et la pharmacie n'est plus une affaire aussi rentable qu'auparavant. »
En Corrèze, le nombre de pharmacies a diminué de 20% ces quinze dernières années. Les pharmaciens attendent la revalorisation de leurs honoraires, gelée depuis trois ans. « C'est une forte attente en Limousin, souligne Olivier Marquet. Nous sommes principalement rémunérés par les honoraires et les médicaments. Nos officines ne vendent pas des tonnes de parapharmacie. »
Mais sur les médicaments, ça coince aussi. La pénurie à laquelle font face les professionnels est au cœur des tensions avec le Gouvernement.
La pénurie de médicaments, source de stress pour les pharmaciens et la patientèleSur ce point, les syndicats réclament un « approvisionnement adéquat pour permettre l'accès aux soins à tous les patients » et « une transparence des données ».
Le manque d'accessibilité à certains traitements est source de stress pour la patientèle et les pharmaciens. Ces derniers passeraient près de 12 heures par semaine en moyenne pour trouver des solutions alternatives, dans l'espoir qu'elles conviennent face aux traitements de longue durée.
Vent debout contre la vente des médicaments en ligne« Face à cette pénurie, le Gouvernement n'a rien trouvé de mieux que de proposer un projet pour libéraliser la vente des médicaments sur internet », déplore Olivier Marquet. La mesure renforce la tendance ultra-concurrentielle du marché, sur lequel se développent les parapharmacies dans les grandes surfaces « plus avantagées pour acheter les médicaments en gros ».
Le 30 mai prochain, la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France en Limousin manifestera un « ras-le-bol général » des pharmaciens. Le mouvement pourrait être suivi sur le territoire. La profession a déjà montré à plusieurs reprises sa capacité à se mobiliser.
Aline Combrouze