La médiathèque propose de revenir, le temps d’une soirée-documentaire « Cinékanak », sur les évènements qui ont déchiré la Nouvelle-Calédonie dans les années 80.
L’actualité néo-calédonienne est à nouveau brûlante avec des élections provinciales qui font débat. À la veille de ces dernières, la médiathèque se penche sur l’histoire récente de ce territoire français du bout du monde. Avec deux témoins, dont Iabe Pacalas. Interview.
Quel âge aviez-vous lors des évènements, en 1988, et quelle transmission en avez-vous eue ? « J’avais 6 ans, mais j’ai encore la sensation de bruits, le souvenir des fourgons de police et des fumées des bombes lacrymogènes. Le déroulement et la compréhension sont venus beaucoup plus tard. Mes parents ont voulu me préserver, mais ils savaient que les questions viendraient nécessairement. Beaucoup de mes images sont donc venues par l’oralité. »
2010, vous êtes en France pour vos études et on vous contacte pour tenir le rôle de votre oncle dans le film de Mathieu Kassovitz, « L’ordre et la morale » . « J’ai 28 ans alors. Je fais des castings sauvages dans les villes, les endroits où mon peuple est présent et s’active pour que perdure la mémoire. Tenir le rôle de mon oncle relevait d’un double challenge. Il était à la fois un héros familial et un père fondateur de notre peuple. Nous étions du même sang, il me fallait l’aval de la famille sinon je ne me serais pas engagé. »
Des souvenirs particuliers du tournage ? De la direction de Mathieu Kassovitz ? « En Polynésie, avec plein de membres de ma famille dans le rôle des figurants. Nous avons totalement adhéré derrière Mathieu Kassovitz. Il était fort bien documenté et il est lui-même un personnage de révolte et de justice. Un personnage qui symbolise la vérité. »
Le film est diversement accueilli et vous, un temps, vous êtes sur la liste des possibles nominés aux César. Avec le recul, il reste quoi de votre engagement ? « Lors de la première projection professionnelle, nous avons tous été convaincus. Certes, en deux heures de film, on ne peut pas tout raconter, mais la puissance du cinéma était bien là pour retracer ce moment de décolonisation. Il s’agissait d’un film politique qui dénonçait l’essentiel. »
C’est quoi l’actualité en Nouvelle-Calédonie ? « Le maintien du troisième référendum était une absurdité. J’insiste sur le fait qu’il n’y a pas eu boycott par les indépendantistes, mais une non-participation à ce dernier dans un moment de pandémie particulier. La participation au vote n’a jamais été empêchée en quoique ce soit. »
Le cinéma, toujours un objectif pour vous ? « Bien sûr, mais je veux porter des projets qui ont du sens. La seule fiction ne me suffit pas. »
Pratique. Samedi 30 mars 2024, à 17 heures, soirée documentaire « Cinékanak » à la Médiathèque Valéry Larbaud de Vichy. Projection gratuite pour un public ados/adultes. Infos : 04.70.58.42.50.
