Les Bleus de France ont vu leur rêve commun se briser sur le froid pragmatisme et l’intransigeante défense sud-africaine, ce dimanche 15 octobre en quarts de finale de leur Coupe du monde. Vainqueur d'un petit point (28-29), le champion de titre continue l’aventure, laissant le XV de France à des regrets forcément éternels.
Le sport et ses rendez-vous sans retour possible sont, le plus souvent, d’une cruauté sans nom. Il y a ceux qu’une élimination touche moins, conscients qu’atteindre le niveau des quarts de finale d’une Coupe du monde est déjà en soi une performance remarquable. Et puis, il y a les équipes dont la quête suprême est un parcours de vie, tracé depuis quatre ans, guidé par une flèche du temps dont le maître horloger, on parle bien sûr de Fabien Galthié, a fixé le timing et l’heure d’arrivée.
Comme l’a déclaré Andy Farrell, le sélectionneur de la formidable Irlande, à propos de son équipe mise à genoux par des Blacks titanesques, le quinze de France est ce dimanche soir « mort avec ses crampons ». Le noir s’est abattu sur la plaine de Saint-Denis, où se sont envolées les promesses d’un premier sacre mondial pour l’équipe de France, sans doute, la plus belle de l’histoire.
Mais à ce stade d’une telle compétition, il ne peut exister de perdants magnifiques. Surtout pas les Bleus de ce dimanche soir, éreintés, essorés par les Springboks. Les hommes de Galthié ont quasiment tout bien fait pendant quatre ans, les cinq premières semaines de compétition comprises. Et pourtant…
Déjà, s’il y a une entame de match qu’il ne fallait pas rater, c’était bien celle-ci. Quel pied ! On nous annonçait une partie de mandolines, de chocs frontaux et on en a vu trente-six chandelles. Des coups de pied en veux-tu en voilà, des petits par-dessus, des ogives tombées très haut du ciel, de toutes les couleurs. Chacun dans son style. Ce sont d’abord les Bleus qui ont éclairé ce quart de finale. Avec un premier coup de patte soyeux de Dupont.
Ça partait fort et on n’allait pas être déçu, avec des coups rendus de part et d’autre, des essais à la pelle, comme s’il en pleuvait. Dans ce quart de folie, pas une équipe ne relâcha son effort ni son attention. Et c’est encore sur un petit coup de pied croisé de Dupont (pour Penaud) que fut jouée la touche gagnante pour les Bleus, avec un essai furieux de Baille, étonnant pilier-marqueur d’essais.
Une fin étouffante, des Bleus à bout de souffleA 22-19 à la pause, il restait aux Bleus quarante minutes pour transformer cette soirée emballante en extase totale. A 15 contre 14 (jaune d’Etzebeth), il y avait un truc à faire sur cette reprise de match. Mais les défenses, malmenées en première mi-temps, serrèrent les boulons. Après 14 minutes sans point, une anomalie dans ce match jusque-là, une nouvelle pénalité de Ramos donna un peu plus d’air à son équipe (25-19).
L’air, parlons-en, il devint de plus en plus irrespirable quand la furieuse intensité des duels s’imposa à un jeu de moins en moins aéré. À l’heure de jeu, alors que les Springboks se rapprochaient de la zone de marque, le pressing défensif des Bleus monta de plusieurs crans.
Et quand le colosse Etzebeth emporta Jalibert, Ramos et Wardi dans l’en-but, à moins d’un quart d’heure de la fin, on s’est dit « sale temps ». Encore plus après le but longue distance de Pollard (29-25, 69e).
Ramos recolla à sept minutes de la fin (28-29), les Bleus jetèrent tout dans cette féroce bataille. Il y eut même une dernière relance de dingos, mais un ultime ballon perdu fit chavirer un stade, un pays entier dans le désarroi. Cruel.
À Saint-Denis, Christophe Buronchristophe.buron@centrefrance.com
La fiche technique :