Ce lundi, au premier jour du procès de deux Albanais pour le meurtre d'un septuagénaire à coups de marteau, en 2018, à Clermont-Ferrand, la cour d'assises a tenté de faire la lumière sur cette scène d'une extrême violence.
Les photographies de l’appartement maculé de sang défilent devant la cour d’assises du Puy-de-Dôme. C’est dans ce modeste F2, situé au premier étage d’un immeuble du quartier Saint-Jacques, à Clermont-Ferrand, que Djelloul Boudjemaa, 78 ans, a été tué. Le 12 juin 2018, en soirée, il a succombé à plusieurs coups portés à la tête, probablement avec une pince ou un marteau.
Quelle explication à cette "sauvagerie" ?Ce lundi, face aux jurés, le directeur d’enquête de la police judiciaire de Clermont-Ferrand expose le travail de fourmi qui a permis l’identification de deux suspects, aujourd’hui dans le box : Eljando Drini, 26 ans, et Evisa Shiroka, 28 ans (*), les locataires de l’appartement. Son rapport est complet, précis. En revanche, le policier reconnaît « ne pas avoir trouvé d’éléments pour expliquer une telle sauvagerie. »
Ce jour-là, Djelloul Boudjemaa avait quitté son logement, rue Barbier-Daubrée, pour rejoindre celui Eljando Drini. Le premier, surnommé Boudji, était un trafiquant de stupéfiants encore très actif malgré son âge. « Davantage pour payer ses clopes que pour mener la grande vie », nuance l’enquêteur.
Une histoire de dette ?Le second était aussi fiché par la police albanaise pour trafic de drogue. Les deux se connaissaient depuis plusieurs mois. Le septuagénaire devait-il de l’argent, comme le suppose l'un de ses amis ? Toujours est-il que le 12 juin 2018, d’après les investigations, Djelloul Boudjemaa se rend à Saint-Jacques « sans crainte, en short et en tee-shirt ».
La suite est allée très vite. Arrivé dans l’appartement des Albanais, Boudji n’a pas le temps de partager l’apéro qui semblait l’attendre. Eljando Drini reconnaît l’avoir frappé à la tête. Un ou deux coups, dira-t-il lors de l’instruction. « Cela ne colle pas, on voit bien qu’il y en a plusieurs », corrige le médecin légiste.
La description que l’accusé livre de la victime ce soir-là ne colle pas, elle non plus, avec l’homme « serviable et non-violent » décrit pas ses amis et que lui-même voyait "comme un grand-père".
« Quand il est venu, il était énervé. Il m’a demandé de venir braquer, de vendre de la drogue, il m’a menacé avec un pistolet. Alors j’ai pris une pince, un marteau, je ne me rappelle même pas. J’ai pris panique. »
Quand Sébastien Talenti, le président, lui demande des précisions sur cette scène d’une extrême violence, il esquive et devient encore plus confus
"J'ai pris panique"« La panique vous rend amnésique ? », le provoque le juge. « Elle est en tout cas à géométrie variable ». Et de lui rappeler le nettoyage méthodique de la scène de crime, la fuite en taxi des deux Albanais.
Sans oublier le dépôt du cadavre à la tête fracassée et enroulé dans trois couvertures, dans le coffre verrouillé de la voiture de la victime. « Je pensais que quelqu’un le trouverait et l’emmènerait à l’hôpital… », tente maladroitement Drini. La « sauvagerie » est encore restée déconcertante, ce lundi. (*) Fait rare, la jeune albanaise, qui devait comparaître libre, a finalement rejoint son ex-compagnon dans le box pour avoir contrevenu à son contrôle judiciaire et aux règles de procédures des assises.
Olivier Choruszko