Raymond Guillot souhaite entretenir le souvenir des maquisards assassinés en mai 1944 à Saint-Maurice-la-Souterraine (Creuse). Il a conçu il y a dix ans un parcours de mémoire avec des panneaux explicatifs qui sont aujourd’hui en mauvais état.
« Ils se sont fait surprendre ici. Ils étaient en train de s’installer, raconte Raymond Guillot. C’était très surveillé. Ce sont les gardes mobiles qui les ont encerclés. Il y a eu un mort juste ici. » Ce professeur d’Université à la retraite, qui habite en Côte-d’Or, est toujours ému quand il se revient sur les lieux où deux résistants du maquis de La Souterraine/Grand-Bourg ont été tués en mai 1944.
Il se rend régulièrement sur ce petit sentier qui part du village du Chaussat, à Saint-Maurice-la-Souterraine, près des bois de la Bonnelle et d’Annet. « C’est le chemin de l’humiliation. C’est la collaboration d’État. Ce sont les gardes mobiles français qui ont fait ça. »
Abattus à quelques minutes d’intervalleGeorges Périchaud, 43 ans, et Raymond Gorre, 20 ans, deux combattants des FTPF, ont été abattus à quelques minutes d’intervalle le 17 mai 1944. « Ils ont fait porter le corps sanguinolent de Georges Périchaud sur les épaules de ses camarades, pratiquement jusqu’à La Souterraine, poursuit Raymond Guillot. C’est la perversion de la collaboration. Tout ça entre Français. »
Le 18 mai, d’autres membres des forces de répression de la collaboration retrouvent le corps de Raymond Gorre, qui avait agonisé toute la nuit. « Ils l’ont abattu. Ils ont ensuite réquisitionné un fermier pour qu’il sorte son tombereau. Lui aussi a été transporté en direction de la Souterraine. Les femmes se sont mises à les insulter. C’était des Français du régime de Vichy. C’est resté longtemps enfoui dans les mémoires. »Raymond Guillot, photo Bruno Barlier
Les deux corps ont été exposés à la mairie de Saint-Maurice-la-Souterraine, avant d’être enterrés au cimetière.
Une quinzaine d’autres combattants du maquis de la Souterraine ont été faits prisonniers et livrés au Deuxième service de la Milice à Limoges. « Ils ont été torturés », glisse Raymond Guillot. « Les deux chefs ont été fusillés » sur ordre de la Milice, le 23 juin 1944, à la prison du champ de foire de Limoges.
Passionné d’histoire, Raymond Guillot a conçu un itinéraire de mémoire, baptisé Les voies de la Résistance, en coopération avec Marc Parrotin et René Paquet (deux résistants creusois décédés en 2015 et 2016). L’initiative a été lancée par l’association nationale des anciens combattants de la Résistance (comité de la Creuse). Inauguré en mai 2011, le parcours « reprend le circuit de l’attaque ». Une dizaine de panneaux explicatifs jalonne l’itinéraire, qui comprend aussi des stèles plus anciennes.Une stèle ancienne, photo Bruno Barlier
Les inscriptions situées au village du Chaussat et au cimetière de Saint-Maurice-la-Souterraine ont été effacées par l’usure du temps. Pour continuer le devoir de mémoire, Raymond Guillot aimerait que les panneaux soient refaits. Il lance un appel à la nouvelle municipalité de Saint-Maurice.
Des témoignages bientôt sur internet ?Il souhaiterait aussi rendre publics la cinquantaine de témoignages qu’il a recueillis il y a quelques années. « J’ai rencontré des habitants du village, notamment une gamine qui avait 12 ans à l’époque. Les gens ont parlé. Les témoignages sont destinés à être un jour aux Archives et si je peux sur internet. »
Mais pourquoi Raymond Guillot s’est-il intéressé au maquis de La Souterraine/Grand Bourg?? Professeur de droit à la retraite, le septuagénaire habite à Dijon mais revient régulièrement en Creuse. « Je suis un Limousin expatrié. Mon père était maçon de la Creuse. Il avait fait rentrer Georges Périchaud dans la Résistance. Mon père m’avait un peu parlé de ces événements mais je ne connaissais pas tout. Je suis plus disponible depuis la retraite. Je suis venu ici et j’ai tiré le fil de l’écheveau. »
Raymond Guillot veut poursuivre ce travail de mémoire pour que cette page d’Histoire ne tombe pas dans l’oubli. « La Résistance est mal connue. C’est un champ d’interrogation qui est très fort. »
Catherine Perrot
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