Pouvez-vous nous parler de votre parcours en squash ? Qu’est-ce qui vous a amené à pratiquer ce sport et à devenir l’une des meilleures joueuses mondiales ?
Dès mon plus jeune âge, j’étais une enfant très énergique et mes parents ont décidé de me canaliser en me faisant faire du sport. C’est un peu par hasard que j’ai découvert le squash. J’étais inscrite dans un club omnisport où je pratiquais le mini-tennis. Un jour, à l’âge de 7 ans, un coach de squash m’a repérée avec une amie et nous a invitées à essayer. Nous avons toutes les deux accroché immédiatement. Ensuite, les résultats ont commencé à arriver, et c’est ce qui m’a motivée à aller de l’avant. À l’époque, je ne pensais pas que cela deviendrait ma carrière, mais gagner des compétitions a éveillé en moi une vraie passion et un désir constant de me surpasser.
Quels ont été les moments les plus marquants de votre carrière ?
Il y a plusieurs moments qui restent gravés dans ma mémoire. Remporter le titre de championne d’Europe par équipe en 2019 a été l’un des plus grands moments de ma carrière. Battre les Anglaises en finale, ce que nous n’avions jamais réussi à faire auparavant, a rendu cette victoire encore plus spéciale. Le fait de gagner en équipe, avec des amies proches, a rendu ce moment encore plus fort. Ensuite, il y a mes quatre titres du Grand Chelem, que l’on appelait à l’époque des tournois World Tour Platinium. Chacun de ces titres a une saveur particulière. Mon premier, le British Open, est l’un des tournois les plus prestigieux et historiques du circuit, l’équivalent de Wimbledon en tennis. Puis il y a eu le Tournament of Champions à New York, une victoire un peu inattendue mais très significative, suivie de l’US Open à un moment où ma carrière traversait une période difficile. Enfin, gagner de nouveau le Tournament of Champions en 2020, en battant les trois premières mondiales dans la même compétition, a été un accomplissement incroyable.
Comment avez-vous perçu l’évolution du squash depuis le début de votre carrière ? Le squash semble gagner en popularité, qu’en pensez-vous ?
Le squash a effectivement beaucoup évolué. L’arrivée de Nicole David, ancienne numéro 1 mondiale, a marqué un tournant important. Elle a introduit un aspect très physique au squash féminin, poussant tout le monde à devenir plus endurant et rapide pour rivaliser avec elle. Elle a dominé le classement mondial pendant huit ans et a ainsi influencé toute une génération de joueuses. Par ailleurs, des changements de règles, comme l’abaissement du tin (la planche située en bas du mur avant) à la même hauteur que celui des hommes, ont rendu le jeu plus rapide, plus physique et plus spectaculaire. L’arrivée en force des joueuses égyptiennes a également révolutionné le squash féminin, avec de plus en plus de jeunes talents qui dominent le circuit international.
En France, pensez-vous que le squash bénéficie de suffisamment de visibilité ? Qu’aimeriez-vous voir changer à ce niveau ?
Nous avons effectivement souffert d’un manque de médiatisation ces dernières années. Mais avec l’inclusion du squash aux Jeux Olympiques, nous espérons que cela ouvrira des portes, tant en termes de couverture médiatique que de financements, que ce soit de la part de l’État ou des sponsors privés. Être un sport olympique peut souvent faire toute la différence.
Quels sont vos objectifs pour les Jeux Olympiques ? Vous avez décidé de reprendre votre carrière pour tenter de vous qualifier.
Tout au long de ma carrière, j’ai vu le squash candidater à plusieurs reprises pour être inclus aux Jeux Olympiques, et j’ai vécu plusieurs déceptions avec chaque refus. À un moment donné, je n’y croyais plus vraiment. Mais maintenant que le squash a été retenu, j’ai senti que je devais essayer de participer. C’est un rêve pour tout athlète de pouvoir concourir aux Jeux Olympiques. C’est une compétition qui fait rêver. Avec mon entourage, on s’est dit qu’il serait dommage de ne pas tenter ma chance, alors je me remets au travail pour être prête en 2028.
En tant qu’ambassadrice du Paris Squash, un événement qui aura lieu du 15 au 21 septembre, pouvez-vous nous parler de cet événement ?
L’année dernière, nous avons organisé la première édition du Paris Squash, et ce fut un grand succès. Tous les meilleurs joueurs mondiaux étaient présents et le public a répondu en nombre. Le cadre, devant la Tour Eiffel et le Palais de Tokyo, était simplement incroyable. Dès le début, nous voulions que cet événement devienne un rendez-vous annuel, un peu comme Roland-Garros pour le tennis. Cette année, nous changeons de lieu pour le Cirque d’Hiver dans le 11e arrondissement de Paris. Tous les meilleurs mondiaux seront de nouveau présents, ce qui est formidable. Nous espérons encore une belle fête du squash.
Que représente pour vous le rôle d’ambassadrice de cet événement ?
Avec mon coach, qui est maintenant le directeur du tournoi, nous trouvions dommage qu’il n’y ait pas de grand tournoi de squash à Paris. L’idée d’organiser un tel événement était une première motivation. L’année dernière, quand nous avons réussi à le faire, nous étions extrêmement fiers. C’était aussi une manière de montrer que le squash a sa place parmi les grands sports, même avant d’être officiellement reconnu comme discipline olympique. Nous voulions prouver que notre sport mérite d’être mis en avant, et que Paris manquait une belle opportunité en ne l’incluant pas aux Jeux de Paris 2024. Maintenant, nous avons la chance de montrer ce qu’on peut faire, et c’est très excitant.
Quels sont vos projets futurs, à court et moyen terme ?
Mon objectif à long terme est de participer aux Jeux Olympiques de 2028, mais avant cela, je dois remonter dans le classement mondial. Je pars de zéro, donc je vais participer à de petits tournois pour gagner des points. J’ai un petit tournoi prévu ce week-end, et je vais essayer de me qualifier pour le tournoi de Paris. Mon principal défi sera de rester en bonne santé pendant les quatre prochaines années, pour éviter les blessures sérieuses. La gestion de mon corps et de mon mental sera cruciale, d’autant plus que ma vie personnelle a changé depuis deux ans. J’ai maintenant une famille, et trouver un équilibre entre la carrière sportive et la vie de famille est essentiel.
Comment se passe votre retour à la compétition après deux ans de pause ?
Les sensations sur le court reviennent assez rapidement, ce qui est très agréable. Il y a aussi une fraîcheur mentale qui fait du bien. Par contre, sur le plan physique, il faut travailler dur pour retrouver les bonnes sensations. Mais cette fraîcheur mentale est un atout majeur au début de ce retour.
En tant que maman, comment vivez-vous cette reprise ? Cela apporte-t-il un nouvel équilibre ?
Je comprends ce que disent d’autres sportives qui trouvent une force dans le fait de revenir après une maternité. Pour l’instant, c’est assez récent pour moi, et je me concentre surtout sur les nouvelles organisations familiales. Il faut être plus indulgente envers soi-même, surtout quand on traverse des nuits difficiles ou que ma fille est malade. Il y a forcément des moments où les conditions ne sont pas idéales pour s’entraîner. Mais je prends cela avec plus de recul maintenant. Cela m’aide à garder un bon équilibre mental, car j’ai autre chose à penser après le sport.
Quel message souhaitez-vous adresser aux jeunes qui aspirent à une carrière sportive et rêvent de devenir des champions, comme vous l’avez fait en squash ?
Je leur dirais que c’est un parcours difficile, atypique, mais qui en vaut la peine. Le sport permet de faire de beaux voyages, de rencontrer des personnes formidables et de découvrir différentes cultures. Même si l’objectif principal est de performer, il faut savoir apprécier tout ce qui entoure cette vie de sportif, car c’est une expérience riche en enseignements et en découvertes.