Avez-vous été étonnée suite aux dérives dénoncées dans l’ouvrage de Victor Castanet "Les Ogres" ?Malheureusement non. Les professionnels de ce secteur, eux-mêmes, sont au courant de ce qui se passe dans certaines structures. Mais attention, il ne faut pas mettre tout le monde dans le même panier…
Comment expliquez-vous que de telles choses puissent se produire ?C’est l’ensemble de notre système qui est à remettre en cause. Les métiers de la petite enfance ne sont pas assez valorisés et accompagnés. Ils manquent de personnel (NDLR : selon le ministère des Solidarités, en France, en 2022, il manquait des professionnels dans 49 % des crèches). Il faudrait un vrai choc de l’attractivité pour ce secteur qui est négligé. Il mériterait que l’État s’y investisse car il s’agit de prendre en charge des petits êtres à une période charnière de leur vie. Elle aura une incidence sur les adultes de demain. La petite enfance ne devrait donc pas être une activité lucrative. La formation régulière, avec toutes les nouvelles connaissances que nous avons acquises récemment, comme les neurosciences et le développement de l’enfant, est indispensable. Malheureusement, beaucoup de personnel de crèche et d’assistantes maternelles n’ont pas forcément ce type de bagage nécessaire pour accompagner au quotidien les plus petits. Enfin, il faut savoir qu’au-delà des dérives qui ont été révélées dans cet ouvrage, l’accueil en crèche, comme il est souvent effectué, ne convient pas aux besoins spécifiques des petits enfants.
C’est-à-dire ?Il est prouvé que les bébés ont besoin de figure d’attachement unique. À la crèche, le bébé verra forcément plusieurs visages durant la semaine. De plus, il n’y a pas suffisamment de personnel pour répondre au plus vite aux besoins d’un enfant. Par exemple, si un bébé doit attendre son tour avant d’avoir son biberon, c’est déjà une forme de maltraitance. L’accueil en collectivité n’est pas ce qui est le plus adapté pour les plus petits. Mais attention, il ne s’agit pas ici de faire culpabiliser les parents. Quand on doit travailler, on n’a pas le choix. C’est le système français qui veut ça.
Il faudrait donc revoir tout le système ?Oui, et il faudrait surtout des décisions politiques pérennes qui répondent aux besoins de l’enfant et des parents.
Quels sont les signaux qui doivent alarmer les parents dans un cas de maltraitance en crèche ou auprès d’une assistante maternelle ?Déjà, si votre enfant pleure souvent, il ne faut pas forcément s’inquiéter tout de suite car cela peut être lié à plusieurs autres facteurs comme un reflux gastro-œsophagien (RGO), des pleurs de fatigue… Par contre, il faut être attentif au comportement des adultes qui s’occupent de votre enfant. Il est nécessaire d’observer les réponses qu’ils donnent à ses sollicitations, si le ton est sec à son égard, si les gestes sont brusques… Autre point, si l’enfant se comporte de façon agressive, cela peut être un signe de mal-être. Par exemple, s’il prend sa poupée et la jette violemment. Les petits fonctionnent beaucoup par mimétisme. Enfin, toutes traces de coup ou d’empoignement doivent être constatées auprès d’un professionnel de santé et être signalées auprès de l’équipe et de la direction de la crèche.
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Propos recueillis par Stéphanie Merzet