Vous aussi, il vous est arrivé de rencontrer une connaissance qui vous raconte une cueillette miraculeuse de cèpes ou de girolles, et qui, quand vous lui demandez où il a réalisé cette récolte vous rétorque : « mais tu ne crois quand même que je vais te donner mes coins???! ». Car oui, s’il y a bien quelque chose que l’on conserve secrètement, ce sont ses coins à champignons. Pour avoir le plus de chances d’en trouver, nous nous sommes rendus au sud-est de la région Auvergne, entre Puy-de-Dôme et Haute-Loire, territoire bien connu des amateurs de champignons, afin de rencontrer ces spécialistes, et de tenter de glaner quelques conseils.
Guetter les voitures sur le bord de la routeBernard ne ramasse que les espèces qu'il connaît : cèpes, girolles et pieds de mouton.Au petit matin de ce dernier mercredi de septembre, le temps est frais mais le soleil est de la partie. Tandis que nous faisons route vers Saint-Alyre-d’Arlanc, nous croisons quelques voitures stationnées sur le bord de la route. Et si nos premiers champignons étaient là?? Tandis que nous nous enfonçons dans les bois, nous croisons Bernard et Jacky, venus de Clermont-Ferrand, à 1?h?30 de route. Le premier vient ici depuis 30 ans. « On en trouve, mais il y en a pas mal qui sont mangés par les limaces », constate-t-il. Bernard avance doucement sur un tapis de mousse, slalome dans la multitude de champignons qu’il croise, sans forcément s’arrêter. Son conseil?? « Ne ramasser que ceux que l’on connaît ». Lui se contente ainsi des cèpes, girolles et pieds de mouton. « Il faut de la patience et y aller doucement. Ça se mérite?! », complète Jacky.
Un bout de forêt, de la mousse...Les sols très moussus et humides sont idéaux pour accueillir les champignons, à l'image de ces petits mousserons des bois.Quelques kilomètres plus loin, nous faisons halte à Saint-Alyre. David tient le restaurant Gaspard des Montagnes. Des ramasseurs de champignons, il en voit tous les jours en ce moment, venus parfois de loin. Et comment font-ils pour se repérer?? « Dans le secteur, dès qu’il y a de la mousse et un bout de forêt, il y a des champignons », nous glisse-t-il. Facile?! A priori… Sur ce plateau casadéen, nous roulons jusqu’à La Chaise-Dieu, principale commune du secteur. À l’entrée du village, des panneaux annoncent la traditionnelle foire aux champignons, programmée cette année le 24 octobre. L’endroit idéal pour poursuivre notre quête. Dans le centre, nous croisons un habitant du cru qui nous confirme que la saison est bonne.
« Il y a eu beaucoup de pluie donc c’est une année à champignons. Et ils sont de bonne qualité. La lune est descendante et le temps est frais mais il y en a, vous en trouverez »
Se lever tôt car certains ne vous ont pas attenduLéana était sur le pont dès huit heures du matin. Et le résultat est au rendez-vous.Sur la route d’Allègre, nous croisons justement Léana. La jeune femme habite depuis deux ans en Haute-Loire mais connaît déjà quelques bons coins. « Quand je suis en vacances, je viens tous les matins. Là, on est arrivé à 8 heures et il y avait déjà 5 ou 6 voitures », note-t-elle, tandis que sa maman, Sandrine, met la main sur un magnifique cèpe.
« Avec le temps, on commence à savoir où chercher. C’est souvent au feeling »
« En ce moment, on repasse tous les matins, et chaque jour il y en a », s’enthousiasme la jeune Avignonnaise, qui fait toujours vérifier sa récolte par un pharmacien.
Léana nous conseille de changer de versant. Sitôt dit, sitôt fait. Terrain ratissé, champignons retournés : nous ne sommes pas les premiers sur le coup. Pour trouver des champignons, il faut donc se lever tôt… et prendre un moment pour déjeuner à midi.
Bien écouter les conseils... si on vous en donneJean-Claude et Francis (de gauche à droite) sont des habitués du secteur. Quelques jours avant notre passage, ils avaient ramassé 15 kg de cèpes.Sur une table voisine dans ce petit restaurant de La Chaise-Dieu, la conversation s’engage autour… des champignons. Francis, 80 ans, venu du Puy-en-Velay avec son ami Jean-Claude, montre une photo sur son téléphone. « Lundi, on en a cueilli près de 15 kg. Là, le froid a coupé un peu la pousse, nous n’en avons trouvé que 100 (!) ce matin », précise ce spécialiste – il travaillait dans la conserverie de champignons. Ces jours-ci, le duo vient plusieurs fois par semaine (lire ci-contre) sur ce territoire qu’ils connaissent comme leur poche. De là à nous dévoiler l’un de leurs coins??
« Même si je vous l’indiquais, vous ne le trouveriez pas si je ne suis pas avec vous »,
Jean-Claude nous annonce tout de même la direction qu'il s'apprête à prendre. Direction que nous suivons.
Et enfin, la magie opèreNous avons finalement réussi à trouver quelques cèpes. L'honneur est sauf.Car il est bientôt 15 heures et notre panier est toujours vide. Nous posons la voiture, seuls en contrebas d’un bois. De la mousse, de l’humidité, un mélange de feuillus et de résineux… Tout est réuni. Et là, le miracle opère. Caché sous les feuilles, un magnifique cèpe s’offre à nous. Suivront une demi-douzaine d’autres. Parfait pour accompagner l’omelette du soir… En revanche, pour la revente des champignons, à l’image de ces véhicules qui se succèdent chez les grossistes du coin en fin d’après-midi, il faudra repasser.
Maxime Escot