Le rêve, si beau mais un peu fou, né dans l’esprit créatif d’Henrik Olesen il y a vingt ans, vient de prendre vie. Tout comme le quartier du Cul-de-sac, composé de bâtisses allant du Moyen-Âge à la Renaissance et remarquablement conservées. Comme quoi, tout vient à point à qui sait rêver grand, et inspirer d’emblée la sympathie. Et Henrik Olesen, tout comme les dix compères ayant tour à tour racheté ou loué les bâtiments anciens (et pourtant jusqu’ici pas encore classés aux monuments historiques) du quartier, sont définitivement de ceux-là.
Des passionnés d’histoire et d’art« On a pris la maladie des vieilles pierres, c’est très dangereux ! » s’amuse Henrik, diplomate danois retraité, et installé ici avec son épouse Silva depuis 20 ans. « Quand on a vu l’ancienne auberge du XVe siècle, on n’a pas pu résister. Et puis j’ai convaincu ma femme que c’était peut-être une bonne idée d’acheter l’ancien hôtel-Dieu, datant du XIIe… »Henrik Olesen derrière l'ancien hôtel-Dieu
De fil en aiguille, leur patrimoine s’élargit, les rénovations vont bon train, et ces passionnés d’histoire autant que de beaux objets lancent leur activité d’antiquaire. « Mais on s’est dit “ c’est un peu trop grand pour nous ”. Alors j’en ai parlé autour de moi… » Et ça fonctionne. Les demandes affluent, et en quelques mois seulement, l’équipe des compagnons du quartier du Cul-de-sac est au complet.
Alexandra-Aelia et Nico-Janis, expertes de la sellerie-maroquinerie, sont les dernières à avoir posé leurs bagages dans le quartier. Leur atelier Les cuirs de la licorne est encore en cours d’aménagement, et elles n’en reviennent toujours pas de l’accueil qui leur a été réservé : « On est venues visiter, et on s’est dit “ ce village est complètement fou ! ” Socialement c’est super. Et notre carnet de commandes est plein alors qu’on n’ouvre qu’en septembre. »Les Cuirs de la licorne, atelier de sellerie-maroquinerie d'Alexandra-Aelia Bruneel et Nico-Janis Moreels
Vanessa et Franck, restaurateurs près de Cannes, voulaient s’installer dans l’Allier. Henrik les a convaincus de choisir Chantelle, et ils ne le regrettent pas : « Il y a une émulation ici, et les gens le ressentent. Et entre nous, on s’entend bien, car on est tous un peu fous… » Au Cul-de-sac, café, bar à vin et brocante, les époux solaires accueillent les habitants, habitués, et les touristes de passage.
Pour tous les goûts, et tous les porte-monnaieUn couple d’artistes installés dans leur atelier-galerie, deux autres couples d’antiquaires - en plus d’Henrik et Silva -, et un brocanteur, complètent le tableau. Mobilier de designer des années soixante, antiquités asiatiques, œuvres d’art, anciennes plaques en métal, mobilier… Chacun a sa spécialité, et il y en a pour tous les goûts, et tous les porte-monnaie.
Franck Colomba, facétieux patron du café, a le sourire quand il explique l’origine du nom du quartier : « Le Cul-de-sac, c’était le mouroir pour ceux qui venaient à l’hôtel-Dieu. La fin de vie. » Dans un pied de nez à l’histoire, une bande de passionnés en a fait, tout au contraire, le symbole de la renaissance.
Texte Sandrine Gras
Photos François-Xavier Gutton