Il rappelle à tout le monde la simplicité de la course à pied : à 95 ans, le sagranier Charly Bancarel sera sur le 10 km du Marathon pour tous des Jeux olympiques. La retraite sportive n’est toujours pas prévue.
À l’évocation, son regard s’allume. Il aura 95 ans lundi, mais Charly Bancarel n’est pas près d’être blasé par la course à pied. Demain, il s’alignera sur le dix kilomètres du Marathon pour tous des Jeux olympiques de Paris, en doyen de la course : « Je suis enchanté de le faire. C’est un honneur pour moi. Cela ne se renouvelle pas tous les ans ! »
Les derniers Jeux olympiques à Paris, c’était en 1924. Charly Bancarel est né le 12 août 1929, cinq ans après. Mais il faudra encore plus de cinq décennies plus pour que ce discret sagranier, chauffeur de bus puis patron du Baillage, se mette à réellement enchaîner les dossards, sur le tard.
Avec une simplicité non-feinte. « J’ai toujours beaucoup marché. Ensuite, c’était juste vivre normalement, faire un peu d’entretien physique », sourit-il. Il se reconnaît un peu de chance, « je n’ai jamais eu de raideur articulaire ou de choses comme ça. »
Puis, années après années, l’âge avançant mais sans faiblir sur les engagements, l’attention s’est portée sur lui. Dans le Cantal, d’abord, où ce marathonien sexagénaire, septuagénaire, puis octogénaire a commencé à se faire un nom en bouclant des parcours à Paris, New-York et Berlin tout en s’alignant sur les trails du coin.
La France l’a découvert au marathon de Paris en 2023. Il en était alors le doyen, à 93 ans. Il s’est laissé porter par la ferveur, accompagné par sa petite-fille Virginie : « Je l’ai vécu en courant avec tout mon cœur. C’était gentil, simple, j’entendais partout “Charly, Charly !”. C’était incroyable, impensable. »
À Salers, si les locaux connaissent bien ce zébulon aux yeux bleus qui parcourt les routes de Mauriac à Saint-Paul, par tous les temps, à pied comme à vélo, les touristes ont commencé à l’arrêter pour faire des photos. Sa sélection pour porter la flamme olympique, à Bergerac, n’a pas arrangé les choses : Charly Bancarel est devenu une célébrité. Sans le changer. Fier d’avoir été choisi, il est surtout profondément ému d’avoir partagé ce moment avec sa famille.
À Salers, les touristes l’arrêtent pour prendre une photoPour aller à Paris, il continue la même recette que d’habitude : le train d’Aurillac à Austerlitz, la veille du départ, une chambre, toujours dans le même hôtel, la course puis un retour aussi sec au pied du puy Violent, dès dimanche. Tout juste note-t-il que ce sera la première fois qu’il prendra un départ à 23 h 30, mais il balaie cela d’un revers de main : « L’habitude sera facile à prendre, puis c’est sûrement très bien éclairé. Cela ne me porte pas peine. » Pas plus que l’étouffante chaleur, « j’adore ça. »
N’allez pas penser qu’il s’agit d’un jubilé : il remettra le couvert sur le 10 km de Dax, dès le 14 août, auprès de son copain Alain Létard, le speaker de la Pastourelle. Ensuite, « je vais me relâcher un peu, on verra au printemps. » Il a un peu baissé les distances, mais reste agile : « Je cours à ma manière, tranquillement. Je ne me mets pas la pression. »
Le regard pétille, comme celui d’un enfant, au milieu des dizaines de coupes qui décorent son salon. « J’ai toujours des projets, vous savez ! Un jour, quand je serai plus âgé, je rangerai tout ça. » Il rit, reprend sa maxime : « On ne s’arrête pas quand on vieillit, on vieillit quand on s’arrête. » Et à Salers, l’âge n’arrive toujours pas à rattraper Charly Bancarel.
Pierre Chambaud