Peut-on se baigner ou pêcher près d'un barrage ? En Corrèze, les hydroguides informent des risques et font de la prévention

Alors que les températures corréziennes dépassent les 30 °C, quoi de plus tentant et rafraîchissant que de se baigner dans les réserves des barrages. Mais attention, on ne se baigne pas n’importe où. Il y a des règles à respecter pour éviter d’être emporté en aval par une montée de l’eau liée à un turbinage ou en amont par les vannes qui alimentent les équipements. On a suivi un hydroguide qui rappelle ces règles aux touristes.

Alors qu’elle arrive tout juste à l’entrée de la plage de Charles Bas, sur le lac de la Valette, à Marcillac-la-Croisille, Mathilde Ceruse, l’une des deux hydroguides du groupement d’usines du Chastang d’EDF hydro, n’en croit pas ses oreilles, en discutant avec un touriste venu de Loire-Atlantique. « Avec mon kayak, nous sommes allés jusqu’au barrage, on est monté dessus pour voir la vue. C’est en revenant qu’on a vu que nous étions dans la zone d’exclusion… », confie Kevin, le jeune homme, pas conscient du risque pris.

Et il n’est pas le seul à ignorer les règles qui régissent la baignade et la navigation sur les réserves d’eau des barrages et sur l’aval des édifices. C’est pourquoi EDF hydro embauche, chaque été, des jeunes hydroguides. Leur mission ? Aller à la rencontre des baigneurs, des navigateurs, des pêcheurs… pour leur expliquer où ils peuvent aller et surtout où ils ne doivent pas se trouver.

« Ce n’est pas plus dangereux l’été, souligne Sébastien Farge, responsable du groupement d’usines du Chastang de EDF hydro. Ce qui change, c’est la forte fréquentation sur des retenues d’eau prisées. Il y a plus de bateaux, de canoës, des pêcheurs… Il faut faire avec tous ces enjeux, avoir une côte d’eau assez haute tout en produisant de l’électricité. »

Si le premier engagement d’EDF hydro est de permettre aux réserves d’avoir suffisamment d’eau pour les usages touristiques et pouvoir produire de l’énergie, son second engagement est que l’usage touristique de l’eau se fasse en sécurité. Ainsi, des arrêtés préfectoraux interdisent d’approcher à moins de 300 mètres d’un ouvrage hydroélectrique. Des panneaux informent sur les rives. Mais… « Nous avons déjà vu des matelas pneumatiques, des paddles, s’approcher », confie-t-il. Avant le barrage, danger, c’est là qu’est située la vanne qui permet de faire accéder l’eau aux turbines. « Elle est dans la réserve d’eau. Le risque, ce sont les mouvements d’eau qui peuvent entraîner les baigneurs. » C’est pour cela que la partie proche du barrage est interdite.Ce vacancier explique à l'hydroguide comment il est allé jusqu'au barrage de la Valette avec son canoë. Une pratique pourtant interdite. illustration vacances tourisme/23/07/2024/Photo Agnes Gaudin À Marcillac, la vanne est donc située dans une zone interdite à la navigation et à la baignade, matérialisée par des bouées jaunes. C’est ce que l’hydroguide explique aux touristes. « Je vais un peu partout où il y a du monde. Je discute, j’explique ce qu’ils peuvent faire, s’ils peuvent se baigner où ils sont. Si ce n’est pas le cas, je leur dis où aller. Globalement, ça se passe bien », résume Mathilde avec ses flyers de prévention en main.

Mais parfois les habitudes sont tenaces comme pour André qui se baigne avec son chien juste devant le barrage de la Valette, dans la zone interdite. « Cela fait 30 ans que je viens ici. On est tranquille, j’ai pied. Je ne risque rien… », plaide-t-il auprès de l’hydroguide, qui reste intraitable : « Vous ne pouvez pas rester là. »

Mais le risque est aussi en aval des barrages, notamment à cause des lâchers d’eau suite au turbinage. « À l’entrée de Gleny, le dernier hameau avant le barrage en venant d’Argentat, il y a des bouées et un filin qui matérialisent l’interdiction de passage pour les bateaux », précise Sébastien Farge. Impossible aussi dans toute cette zone de pêcher sur le bord car, chaque jour, il peut y avoir plusieurs lâchers d’eau qui entraînent une élévation du niveau de la rivière de plusieurs dizaines de centimètres. « Le plus simple est donc d’interdire d’y être », précise Sébastien Farge. L’hydroguide y veille. « Je suis là pour rappeler les règles, pour faire de la prévention, pas pour tout interdire… Mais il en va de la sécurité des gens… » 

Prévention. En septembre 2023, un octogénaire qui pêchait en aval du barrage de l’Aigle, sur la commune de Soursac, avait été emporté par un lâcher d’eau sur la Dordogne. Quelles sont les règles qui régissent la fréquentation en amont et en aval des barrages?? EDF hydro communique notamment sur le calme apparent autour des barrages qui ne signifie pas pour autant l’absence de risque. Les dix hydroguides mobilisés sur l’ensemble du bassin de la Dordogne sensibilisent ainsi les touristes mais aussi les habitants sur les zones interdites à la navigation, à la baignade et à la pêche (à proximité immédiate en amont et en aval des barrages) et sur les zones de danger en amont et en aval des aménagements hydrauliques avec un rappel sur les différentes réglementations en vigueur (arrêtés préfectoraux…). Cette année, outre les panneaux d’information qui annoncent les risques et si la zone est interdite ou pas, les hydroguides distribuent une petite bande dessinée qui rappelle l’impact d’un lâcher d’eau sur le paysage. Il ne faut donc pas poser sa serviette sur une petite plage non autorisée en aval d’un barrage et une petite embarcation peut rapidement être submergée. C’est pourquoi des bouées interdisant l’approche des barrages sont installées sur les réserves et rivières. Un jeu de neuf questions-réponses distribué aux enfants et à leurs familles Pour sensibiliser un maximum de public, EDF hydro a, cette année, distribué un jeu de neuf questions-réponses à destination des enfants et de leurs familles. « À quel moment peut survenir un lâcher d’eau?? »?; « Près d’une installation hydroélectrique, quel est le risque le plus fréquent pour les pêcheurs?? »?; « Pour une sortie en canoë-kayak en toute sécurité, il est conseillé de… », sont quelques-unes des questions posées. La réponse est donnée à l’arrière des cartes.

Estelle Bardelot