C’est écrit noir sur blanc, en lettres cursives. "Le président de la République et Madame François Mitterrand prient Madame Annie Dissay de leur faire l’honneur d’assister à la réception qu’ils offriront à l’occasion de la Fête nationale, au Palais de l’Élysée, le lundi 14 juillet 1986, à 12 h 30." L’invitation "strictement personnelle" a été délivrée à chacun des 48 habitants de Valz-sous-Chateauneuf, il y a 38 ans.
Première fois à ParisAnne-Marie Dissay tient dans ses mains celle qui fût remise à sa maman. Sourire aux lèvres, elle contemple le papier cartonné, désormais jauni mais soigneusement conservé au milieu de quelques coupures de journaux, de photos, et d’une flopée de souvenirs.
Il faut imaginer l’étonnement qui a parcouru Valz, cette toute petite commune du bassin minier, situé non loin de Jumeaux. Et aussi, l’excitation, à l’annonce d’un tel événement : "Certains se rendaient à Paris pour la première fois !", s’exclame Anne-Marie.
À l’époque, elle avait une trentaine d’années et n’habitait plus à Valz, son village d’enfance. Mais grâce à son frère aîné, Jojo, qui lui a cédé sa place, Anne-Marie a pu prendre part à cette journée extraordinaire, en compagnie de sa mère et de son mari.
Tout le monde s’était mis sur son trente-et-un, relate la sexagénaire. Les petites mamies, les enfants… Nous sommes partis en car, très tôt dans la matinée, avec le maire, Marcel Bertinelli (lire ci-contre), et le sous-préfet d’Issoire. Ce jour-là, Valz était un village fantôme.
Sur l’un des clichés conservés par Anne-Marie, le premier magistrat remet un panier garni de produits locaux au couple présidentiel.
Mais qu’est-ce qui a valu à Valz-sous-Chateauneuf, de se voir convier à la réception présidentielle du 14 juillet ? "Nous étions la plus petite commune de France à avoir voté largement pour le parti socialiste, lors des élections législatives de 1986", explique Anne-Marie. Une très large majorité, puisque 46 habitants, soit 95 % de la population de Valz-sous-Chateauneuf, avaient donné leur voix à la majorité présidentielle.
Rendre la pareilleAu milieu des 250 convives, des buffets et des jardins de l’Élysée, les Castelvalzois ont même pu croiser quelques personnalités. "Alice Sapritch et Enrico Macias", se remémore Anne-Marie. Une véritable soirée digne d’un conte de fées pour celles et ceux qui, à l’époque, représentaient "la France profonde" aux yeux de la capitale. "C’était grandiose. Je crois que je n’ai jamais bu de champagne aussi bon de toute ma vie", affirme Anne-Marie avec malice.
Alors, forcément, quelques mois plus tard, le village a voulu rendre la pareille au chef de l’État en le conviant à Valz-sous-Chateauneuf. Invitation qui fut honorée en février 1987, où François Mitterrand reçut son diplôme de citoyen d’honneur de la commune. Et curieusement, cette visite a, peut-être, encore plus marqué les esprits que le voyage de toute la commune en terre parisienne.
Elora Mazzini