« Ça a été un gros boulot de recherche et de mise en forme pour le service des Archives, mais ce travail a aussi été un vrai plaisir », s’enthousiasme Nicolas Giner, le directeur des Archives municipales et artisan de cette proposition culturelle. Une proposition qui résonne avec la tenue prochaine des Jeux Olympiques en France, mais qui fait vraiment la part belle au sport local, aux clubs, aux personnalités, aux sportifs tullistes.
Certes, il y a une chronologie historique « jusqu’à nos jours », mais jamais on ne s’ennuie avec des histoires pourtant d’une autre époque. Tout est rendu ludique, textes et photos. Et à l’inverse, le charme suranné des photos sépia installe le visiteur dans la grande histoire.
Une épopée même : « Le sport, ce n’est pas que du sport, assure Nicolas Giner, il y a une dimension politique, mais aussi économique, éducative, sociale et culturelle ».
Forger les corps pour le combatL’exposition nous enseigne que la finalité du sport, à la fin du XIXe siècle, n’est pas étrangère à la défaite de 1870. Il s’agissait alors de former les jeunes gens à l’exercice militaire, de renforcer les corps en vue d’une nouvelle guerre. « À Tulle, on le voit dès 1883 et la création de La Tulliste, le premier club de sport de la ville, explique le directeur des Archives, mais aussi avec la création du Sporting club et les débuts du rugby en 1904 ».
Durant les premières décennies du XXe siècle, les pouvoirs publics voient dans la pratique sportive une bonne façon d’encadrer la jeunesse, d’éviter la dérive des passions. Puis, avec le Front Populaire, le souhait de donner accès aux sports et aux loisirs au plus grand nombre.
« Après la Deuxième Guerre mondiale, c’est le sport de masse qui se développe et aujourd’hui, la notion de sport santé a pris une place considérable », observe Nicolas Giner.
Le Sporting, place forte du rugby françaisAutour de ce fil rouge de l’exposition se nouent l’histoire de Tulle et la création des différents clubs de sport : après La Tulliste et le Sporting, apparaissent des clubs concurrents, un club de hockey sur gazon notamment, mais le Sporting et l’engouement pour le rugby forgent une identité tulliste. Le rugby se partage les faveurs du public avec le cyclisme.
En parcourant l’exposition, mais aussi en s’attardant sur la longue vidéo retraçant plusieurs évènements sportifs, petits et grands, on remarque la foule dense, étonnée, curieuse, qui suit le déroulement des matchs ou des épreuves.
Dans les entreprises locales, à commencer par la Manu, des sections sportives se forment. À l’école de gendarmerie également, à EDF-GDF avec le Gazelec. Une filière économique se met en place autour de l’industrie du cycle. L’entreprise Clément-Bayard s’est installée sur le site de l’usine de la Marque et a même aménagé un vélodrome pour y tester ses matériels. À Souilhac, c’est la marque de vélo La Torpille qui prend son envol.
Le premier Tour de la Corrèze est créé dès 1922. Après la guerre, le fameux Bol d’or des Monédières attire les foules aux bords des routes.
Là encore, l’exposition dévoile des photos inattendues : les premières courses locales, mais aussi Louison Bobet, en 1957, qui participe au Bol d’or, ou plus récemment Luc Leblanc, au CCS de Tulle en 1991. Sur d’autres panneaux, de nombreuses photos d’équipes de rugby seront à coup sûr détaillées de près par les plus de 20 ans.
La municipalité en soutienAprès guerre, dès 1946, la municipalité crée un Office municipal des sports. Elle commence à délivrer des subventions à quelques clubs. « Mais surtout, précise encore Nicolas Giner, la municipalité de Tulle, comme les autres d‘ailleurs, finance des infrastructures sportives et des équipements ». Les clubs et le public les réclament. Les photos des gymnases ou des stades de Cueille et du Marquisat, en noir et blanc ou en kodachrome, racontent les années 60.
Impossible de ne pas parler du basket qui arrive à Tulle en 1930. Les fameuses années 70 qui voient l’UST atteindre la Nationale 3, puis à deux reprises la Nationale 2. Pas mal pour une ville de 20.000 habitants?! Et qui en 1970, reçoit la visite des légendaires Harlem Globetrotters?! Éva-sport, créée sous l’égide des Ets Valade en 47, rejoint finalement l’US Tulle Corrèze et aujourd’hui encore, « le basket reste au cœur de la vie sportive tulliste ».
En revanche, le tennis a toujours gardé à Tulle sa réputation de sport élitiste et bourgeois. Bien qu’il atteigne parfois les 160 licenciés, et malgré le succès de la coupe Noël-Diederichs, le tennis ne fédère pas ici comme les sports collectifs.
La montée en puissance du footUn panneau de l’exposition raconte aussi, à travers le football, la guéguerre entre « cathos » et « laïcards ». « La jeunesse tulliste découvre le football au sein des cercles religieux », peut-on lire. Raison de plus pour voir, quelques années plus tard, la création du Cercle laïque tulliste avec ses équipes de foot. Il fusionnera plus tard avec le Sporting, bien avant la création du TFC.
Mille choses restent à découvrir à la visite de cette exposition : que Jean-Pierre de Vicenzi, ancien entraîneur de l’équipe de France de basket, jouait à Tulle en 1980, que la flamme olympique est passée à Tulle en 1968, que c’est un ouvrier de la Manu, Roger Lager qui fonda le premier club de judo en 1947… Plein d'autres choses encore.
2008 : ville la plus sportive de France. Lors de l’inauguration de l’exposition, Bernard Combes a rappelé fièrement l’obtention de ce label par la ville de Tulle. « Un label mérité en raison du nombre de clubs et de pratiques sportives, grâce à l’engagement de tous les bénévoles, les équipements de la ville et leur entretien », a souligné le maire, voulant ainsi associer à cette distinction de nombreux Tullistes.
Arnaud Besnard