C’est un chapelet de réponses hors sujet que livre le prévenu, âgé de 43 ans, jugé, jeudi, en correctionnelle, à Clermont-Ferrand. Masque chirurgical sur le nez, il se présente dans le box comme « la victime » de l’affaire. Le 9 septembre 2022, rue Gomot, à Riom, il avait poignardé un homme au ventre : « Je me tenais l’abdomen avec les mains pour ne pas que ça (les viscères) tombe », raconte le réfugié érythréen, âgé de 32 ans, qui, après l’agression, a dû mettre un terme à sa formation de plaquiste.
Son tort ? Avoir discuté avec une amie du quadragénaire, assise dans la rue, sur les marches de son appartement. Ce dernier lui avait d’abord asséné des coups de pied et de poing. Le jeune homme, défendu par Me Vaz De Azevedo, avait repris son souffle au bar voisin avant de voir revenir Kenny Acadine avec un couteau et le blesser. Il doit son salut à des clients du café qui avaient jeté des chaises sur son agresseur.
"Jalousie maladive"D’une «» et « impulsif », selon l’expert psychiatre, celui-ci n’avait pas apprécié la discussion entre le jeune Érythréen et « sa copine » : « Il embêtait ma nana. Il commençait à la pelotait. Il est barjot dans sa tête ce gars, les témoins aussi ! Vous faites quoi vous, madame la juge, si c’était votre mari ? Moi, je le connais pas, ce gars. Moi, je faisais la cuisine, il débarque comme ça ».Une tirade en boucle qui tourne à vide et qu’un autre juge interrompt : « Écoutez-moi ! ». S’appuyant sur l’expertise psychiatrique qui ne relève aucune maladie, le magistrat lui demande s’il sait faire la part des choses entre ce qui relève de la réalité et de ses sentiments. Réponse sibylline : « On est un être humain ».
"Geste accidentel"Après une heure d’interrogatoire, on comprend qu’il conteste le coup de couteau – il prétend que la victime est tombée sur la lame – malgré six témoins qui décrivent l’agression. Des témoins que son avocat, Me Chidjou, a tenté de mettre en doute avant de défendre « un geste accidentel et involontaire ».
Huit ans de prisonEn l’absence d’introspection autant devant les juges qu’avec l’expert psychiatre qui a conclu à la « dangerosité criminologique » de Kenny Acadine, le procureur Guillaume France a requis sept ans de prison (*) : « Votre positionnement sur les faits est très inquiétant. La question que le tribunal doit se poser est de savoir ce que l’on fait de vous. Vous avez déjà été condamné trois fois pour violences ».Les juges ont ajouté une année supplémentaire avec l’obligation de continuer le suivi psychologique entamé depuis qu’il est incarcéré.
(*) Il encourait une peine de quatorze ans.
Leïla Aberkane