« La collusion avec l’Église catholique, ça suffit ! » Dans le centre Pierre-Cardinal où quelques signataires de la pétition « Non à l’utilisation des fonds publics pour rénover la statue Saint-Joseph d’Espaly » sont réunis, l’agacement est palpable.
Syndicalistes, membres et sympathisants de partis politiques, militants associatifs ou simples contribuables, ils dénoncent, faute de mieux, une « forfaiture ». Ce mouvement de protestation, dont Paulette Malartre, membre de la Libre pensée, rappelle la genèse, est né « en 2016, quand nous avons appris que le bras de la statue était en danger et qu’il fallait réparer ». Qui pour financer l’opération de sauvegarde, estimée aujourd’hui à près d’un million d’euros ? C’est l’équation à l’origine de la colère des membres de la Libre pensée et de ses partenaires de lutte.
D’emblée, le diocèse, propriétaire de l’édifice, avait annoncé qu’il ne pouvait assumer seul le coût des travaux de restauration. Les collectivités, notamment la Région, s’étaient donc engagées à apporter leur soutien au Saint patron des travailleurs, alors même que le colosse ne pouvait « prétendre à aucune subvention publique », le monument espaviot étant « une propriété privée ». « Nous leur avons adressé des courriers pour leur dire qu’il s’agissait d’une grave atteinte à la loi de 1905 (relative à la séparation de l’Église et de l’État, NDLR). Nous avons également interpellé le préfet de l’époque et même le ministre de l’Intérieur d’alors, Bernard Cazeneuve. Il nous avait répondu qu’il allait mener l’enquête », rapporte Paulette Malartre. Puis « plus de nouvelles », le projet de restauration se trouvant dans une impasse juridique.
Il en est sorti quelques années plus tard, avec la création de l’association Les Amis du site de la basilique Saint-Joseph. Un temps missionnée pour recevoir les subventions et donations des mécènes, celle-ci s’est finalement vue déchargée de la conduite du chantier (*). « Les collectivités ont trouvé un autre artifice », fustige la secrétaire de la Libre pensée, dont « les interventions » auprès des autorités ont été relancées par le rebondissement.
« Les retours ont tardé », mais en réponse aux demandes d’explications de l’association, la préfecture, le Département, la Capev ou encore la commune d’Espaly ont réaffirmé que le versement d’une subvention dans le cadre des travaux de restauration de la statue était parfaitement légal. « C’est faux ! », s’insurge Paulette Malartre. Selon elle, les collectivités s’appuient sur « une loi de 1942 » qui les autorise effectivement à participer au financement de la restauration des lieux de culte. Or, « la statue Saint-Joseph n’en est pas un. Elle ne forme pas, avec la basilique, une seule et même entité », avance le porte-voix de la Libre pensée, présidée par Guy Vallery.
Approuvé l’an dernier par les élus, le plan de financement des travaux, « assuré par plus de 80 % d’argent public », rappelle l’élu d’opposition, Laurent Johanny, ne peut plus être attaqué en justice. Reste que les opposants au projet qui avouent leur « impuissance » n’entendent pas rester bouches cousues. « 600.000 € (la part de la Région, ce qui fait d’elle le principal financeur et où des voix s’élèvent aussi contre cette enveloppe - lire notre édition de mardi NDLR), c’est une somme ! », déplore Thomas Decœur (FSU). « Et ce sont les contribuables qui la payent », renchérit Paulette Malartre, pour qui « il y avait mieux à faire que de financer les travaux d’une statue privée ».
Ophélie Crémillieux
(*) Cette mission a été confiée à l’Association diocésaine du Puy.
Signataires. Mise en circulation en février dernier dans sa version papier uniquement, la pétition intitulée « Non à l’utilisation des fonds publics pour rénover la statue Saint-Joseph d’Espaly » a notamment été signée par des membres de la FSU, Génération.s, le PCF 43, la Ligue des droits de l’Homme, Sud éducation, la Libre pensée, le PS, LFI (groupes de Coubon, Le Puy, et l’Emblavez), mais aussi par des élus, tels que Renaud Daumas (les Ecologistes), au conseil régional, et des contribuables d’Espaly ou d’ailleurs.