Une voiture en mémoire du mythe

Sur les hauteurs de Saint-Yorre, dans les premiers contreforts de la Montagne bourbonnaise, le village de Busset est niché autour de son magnifique château.

Dans la rue principale, un garage familial automobile porte le nom de Bugalski, une famille bien connue ici, où chacun conserve le souvenir ému de celui que tout le monde appelait affectueusement « P’tit Bug », le pilote automobile Philippe Bugalski.

Il fut pendant des années l’un des meilleurs pilotes français de rallyes, triple champion de France de rallye et vainqueur de deux manches du championnat du monde, avant de devenir pilote d’essai.

Les Bussétois gardent le souvenir d’un homme charismatique et d’une très grande gentillesse. Quand le 10 août 2012, ils apprennent avec stupeur et incrédulité la mort accidentelle, à 49 ans, de l’enfant du village, c’est une immense tristesse qui envahit tous les habitants, en même temps que l’ensemble du monde international de la course automobile, et ses nombreux amis et fans.

Le pilote, qui a maintes fois frôlé la mort au volant de ses bolides, est décédé lors d’un banal élagage d’un arbre, après avoir fait une mauvaise chute du haut d’une nacelle à 15 mètres de hauteur. Le destin est parfois cruel.

Chez les Bug, le sport auto a toujours été une histoire de famille. Quand Philippe courait, chacun mettait la main à la pâte : père, oncles et tantes, mais aussi sa cousine, qui gérait l’intendance, comme le traçage des cartes. Et si tous ses admirateurs se souviennent de sa voiture Super 5 GT Turbo, il est un jeune Cussétois qui a tenu à faire revivre cette auto mythique en mémoire de Philippe, son cousin.

Matthias Morand Bugalski a souhaité adjoindre à son patronyme le nom de jeune fille de sa mère, Bugalski. Dans cette famille où le sport auto tient une grande place, le jeune Matthias, bientôt 24 ans, est tombé dedans tout petit, comme Obélix dans la potion magique.

« Depuis ma plus tendre enfance, j’ai toujours vu le père de Philippe, qui exploitait le garage, le nez dans les moteurs de R8 Gordini ou de Porsche turbo. » Et Matthias s’est fixé un objectif : refaire une Super 5 GT Turbo phase 2, à l’identique de celle du pilote.

« J’ai trouvé sur Le Bon Coin, du côté de Beaune, le modèle de 1989 que je recherchais, qui était « dans son jus » mais qui roulait, avec plus de 160.000 km au compteur, 6.000 € affaire conclue ».

Pendant plus d’un an, chaque week-end, Matthias, avec son oncle Didier Bugalski, mécanicien au sein du garage familial, et un troisième larron carrossier, se consacrent à donner une nouvelle vie à l’auto, qui est totalement « désossée » et refaite entièrement : moteur, carrosserie, arceaux de sécurité, sièges et accessoires.

Le résultat est bluffant, c’est maintenant une parfaite réplique du bolide de Philippe Bugalski, avec un incroyable souci du moindre détail, les mêmes coloris, et autocollants aux mêmes emplacements. Le nom du pilote et de son co-pilote d’alors, Denis Giraudet, sont en bonne place. Il figure même sur le capot avant et sur le tableau de bord la réplique de la signature authentique du champion.

« Il nous a fallu beaucoup de patience et de recherches pour retrouver certaines pièces qui n’existaient plus en neuves, comme les entourages de pare-brise arrière que nous avons mis plus de 6 mois à dénicher » , précise le jeune passionné qui est heureux d’être arrivé à ses fins, en hommage à la mémoire de ce cousin pour lequel il a toujours eu une profonde admiration.

Ce beau véhicule sagement remisé dans son garage, il ne le sort que pour l’emmener sur des rassemblements de véhicules sportifs, comme à Charade, récemment, où il ne manque pas de susciter admiration et interrogations du public.

Les courses ? Bien sûr, Matthias y songe, c’est un projet en train de mûrir, mais avec une autre voiture qu’il a en vue. Encore du travail en perspective dans le garage familial….

Pendant ce temps, à Busset, l’association « Les Amis de Philippe Bugalski » a été créée pour faire perdurer la mémoire de l’ancien champion, avec à sa tête, bien sûr, famille et amis de Philippe. Chaque année un grand rassemblement de véhicules a lieu dans la cour du château. Une balade de 200 km est prévue au volant des belles mécaniques, sur les petites routes de la Montagne bourbonnaise, que le pilote bussétois affectionnait quand il participait à « La Ronde de Busset » ou à la course de côte du Gué-Chervais, épreuve sur laquelle il a fait ses premières armes.

Les samedi 22 et dimanche 23 juin prochains à Busset, les moteurs vont vrombir à nouveau comme autrefois, pour rendre hommage au pilote disparu. Bien entendu, Matthias Morand Bugalski sera présent, avec sa magnifique réplique qui ne devrait pas passer inaperçue.