Longtemps, Lyon a fait rire la France du foot. Ou pleuré selon que l’on se place dans les pas de l’institution rhodanienne. Ses supporters ont touché le fond le 22 octobre dernier quand Clermont est venu faire la nique à l’OL au Groupama Stadium (1-2). C’était même, pour le coup, la première victoire des Auvergnats.
Lyon, lui, était totalement exsangue et à fond de cale après ces neuf premières journées (trois nuls, six défaites). Un chemin de croix qui allait se poursuivre encore près de deux mois, après la nomination de l’inconnu de la maison, Pierre Sage, en lieu et place de Fabio Grosso, bref intermittent à l’OL.
Par le passé, ce Lyon-là aurait rendu l’âme, dévoré par ses dissensions internes après le départ difficile de l’ex-président Aulas, la pauvreté de son jeu et la perte de confiance du groupe, absolument pas habitué à lutter pour le maintien. Mais dans un football où l’argent est devenu matrice, et comme une jolie fille partie se repomponner, une équipe peut se refaire une beauté au milieu du bal.
À Lyon, face à l’urgence de la situation, on a alors fait les choses en grand. Et c’est une large part de la garde-robe qui a été ripolinée pour redonner vie à l’équipe. Maladroit dans ses déclarations à son arrivée, le président américain John Textor a lui aussi fini par trouver un ton plus approprié.
Deux fois le budget du Clermont Foot dépensé au mercatoMais surtout, il a joint le geste à la parole en injectant 59 millions d'euros au mercato d’hiver ! Une somme qui correspond à plus de deux budgets annuels du Clermont Foot. D’aucuns crieront à la concurrence déloyale, au dévoiement de l’esprit sportif. Mais c’est dans les textes et Eagle Football Holdings Limited, la maison mère de l’OL, libérée du carcan financier de la Ligue, a alors pu s’offrir quelques bijoux (Matic, Fofana, Mangala, Benrahma, Orban, etc.) pour sauver le navire-amiral du groupe.
Ce n’était pourtant pas gagné, d’autant que sur le banc s’est installé un certain Pierre Sage, exfiltré du centre de formation. Un inconnu du grand public dont la principale carte de visite portait la mention d’adjoint à Lyon La Duchère et au Red Star (*). Après des débuts ratés, le Jurassien de 45 ans (il les a eus le 5 mai) a assez vite trouvé les bons mots et la bonne formule pour rebooster un monument du foot français alors en totale décrépitude. Un large succès face à Toulouse (3-0) a donné le ton avant la trêve.
Meilleure équipe de la phase retour avec le PSGDepuis, fort des arrivées du mercato, Sage a même placé la fusée Lyon sur orbite. Sur la phase retour, l’OL est en tête du championnat, ex aequo avec le PSG. Surtout, le style voulu par Sage emballe et terrasse la plupart des équipes. Des buts à gogo, du suspense, des retournements improbables et qui, surtout, se répètent. Comme à Toulouse (2-3), face à Brest (4-3) et Monaco (3-2). Dernier exemple en date, à Lille, lundi (3-4).
Quand les évènements se renouvellent ainsi, difficile de parler de coïncidence. Sage est bien le grand ordonnateur, le stratège en vérité, de ce chambardement qui fait de l’OL aujourd’hui un incroyable candidat à l’Europe. Il tire le meilleur de son large effectif, a su relancer les cadres maison (Lopes, Tolisso, Lacazette), choisit les bons hommes, a su en écarter d’autres. Pour le plus grand bénéficie de son équipe.
Ainsi, depuis sa nomination - 13 succès sur 19 - Lyon a récupéré dix-neuf points après ses changements de joueurs, en seconde période !
Seul bémol à cette orgie, une défense qui reste poreuse, notamment sur coups de pied arrêtés. Cela peut-il inspirer Clermont, par ailleurs si peu à l’aise dans le jeu et si faible devant ? Cette fois, Lyon sera le grand favori. Octobre semble si loin…
(*) Pierre Sage a été adjoint d’Habib Beye sur le banc du Red Star lors de la saison 2022-2023. Un certain Sébastien Bichard, aujourd’hui co-entraîneur du Clermont Foot, avait pris sa suite.
Valéry Lefort