Les autorités géorgiennes ont annoncé mercredi 1er mai l'arrestation de 63 manifestants pro-européens lors d'un rassemblement nocturne, violemment réprimé par la police, contre un projet de loi sur "l'influence étrangère" que ses détracteurs jugent similaire à une législation russe utilisée contre l'opposition.
Le pays du Caucase est en proie à des manifestations antigouvernementales depuis le 9 avril, après que le parti au pouvoir, le Rêve géorgien, a réintroduit ce projet de loi vu comme contraire aux aspirations de Tbilissi à rejoindre l'Union européenne (UE).
"Actes de vandalisme"Dans la nuit de mardi à mercredi, des policiers masqués ont fait usage de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc pour disperser les manifestants, a constaté un journaliste de l’AFP. Plusieurs journalistes ont été pris pour cible, notamment un photographe de l’AFP, frappé à coups de matraque alors qu’il était clairement identifié comme reporter. Le député Levan Khabeishvili, président du principal parti d’opposition, a, lui aussi, été violemment battu et a dû recevoir des soins. Les chaînes de télévision locales ont diffusé des images montrant son visage tuméfié.
Le ministère de l'Intérieur a assuré que les policiers avaient usé de la force de façon "légitime" car la manifestation était "devenue violente". Les protestataires avaient bloqué la circulation devant le Parlement sur la principale artère de Tbilissi, ainsi que sur plusieurs autres axes importants. 63 personnes ont été interpellées pour avoir "désobéi à la police" et commis des actes de vandalisme.
Le Défenseur des droits géorgien, Levan Iosseliani, a demandé l'ouverture d'une enquête sur l'utilisation d'une "force disproportionnée" contre les manifestants et les journalistes.
Ramener la Géorgie dans l'orbite russeMardi 30 avril, les députés géorgiens ont débattu en deuxième lecture du projet de loi que le parti au pouvoir espère faire voter d'ici à la mi-mai. Le texte doit faire l'objet de trois lectures au Parlement et être ratifié par la présidence. La présidente géorgienne devrait opposer son veto, mais le parti au pouvoir dispose d'un nombre de sièges au Parlement suffisant pour passer outre.
Selon ses détracteurs, le projet imite la loi russe sur les "agents de l'étranger", qui est utilisée pour étouffer les voix dissidentes. Au printemps 2023, le parti au pouvoir avait dû renoncer à une première tentative de faire adopter la loi, après des protestations massives. Plusieurs gouvernements géorgiens ont cherché à rapprocher la Géorgie des Occidentaux, mais l'actuel parti au pouvoir a été accusé de vouloir ramener cette ex-république soviétique dans l'orbite de la Russie.
Adhésion à l'UELe puissant milliardaire, Bidzina Ivanichvili, président du parti au pouvoir et considéré comme le dirigeant de facto du pays, s'est adressé lundi 29 avril à une foule rassemblée en conte-manifestation. Le projet de loi vise, selon lui, à renforcer la transparence sur les financements étrangers des associations car "le financement non transparent des ONG est le principal instrument pour la nomination d'un gouvernement géorgien de l'étranger".
Le président du Conseil européen Charles Michel a estimé que le texte n'était pas compatible avec le souhait de la Géorgie de devenir membre de l'UE. En décembre, celle-ci a accordé au pays le statut de candidat officiel, tout en le prévenant qu'il devait se réformer avant toute négociation. La candidature de la Géorgie à l'adhésion à l'UE et à l'OTAN est inscrite dans sa Constitution et est, selon les sondages, largement soutenue par la population.
Avec AFP