"L'équipe de campagne (de la vice-présidente) juge qu'il peut être utile dans les Etats industriels de la +Rust Belt+ et du Midwest", où le président américain bénéficie d'une réputation de "très vigoureux partisan des syndicats", explique John Mark Hansen, professeur de sciences politiques à l'université de Chicago.
Joe Biden se rend jeudi et vendredi dans deux de ces Etats qui seront extrêmement disputés en novembre: le Wisconsin puis le Michigan, dans la région des Grands Lacs. Il va y vanter son bilan de relance économique.
Lundi, le président et la candidate démocrate avaient fait campagne ensemble dans un autre "swing state" - ou Etat pivot: la Pennsylvanie, à la longue histoire industrielle.
Dans la capitale historique de l'acier américain, Pittsburgh, ils ont rivalisé de répliques flatteuses et de gestes affectueux.
"Si vous élisez Kamala Harris à la présidence, ce sera la meilleure décision que vous ayez jamais prise", a lancé le président octogénaire, qui s'est retiré de la course à la Maison Blanche le 21 juillet.
"Thank you Joe!"
Il avait dans la foulée appelé à serrer les rangs derrière la vice-présidente de 59 ans, qui affrontera le républicain Donald Trump, 78 ans, le 5 novembre.
"Joe Biden a été l'un des présidents des Etats-Unis qui a le plus transformé le pays", a pour sa part souligné Kamala Harris, devant une assemblée de militants syndicaux enthousiastes, qu'elle a invités à scander "Thank you Joe!".
Un peu avant, tous deux s'étaient mêlés à quelques familles rassemblées pour célébrer la Fête du travail américaine. Ils ont posé pour des selfies, serré des mains, bavardé avec des enfants, en veillant à ne pas se marcher sur les pieds.
Puis Joe Biden a invité Kamala Harris à monter dans son imposante limousine blindée jusqu'à l'aéroport où leurs deux avions, "Air Force One" et "Air Force Two", les attendaient, sagement garés l'un près de l'autre.
Ce n'est bien sûr pas la première fois aux Etats-Unis qu'un vice-président se lance dans la course à la Maison Blanche, mais c'est généralement après que le président eut atteint la limite constitutionnelle de deux mandats - ainsi Al Gore avec Bill Clinton, George Bush père avec Ronald Reagan...
Il faut remonter à 1968 pour retrouver cette configuration improbable: celle d'un président qui se retire de la course en pleine campagne, avec un vice-président qui prend le relais.
Lyndon B. Johnson avait alors renoncé à se représenter sur fond de mobilisation contre la guerre du Vietnam. Le vice-président Hubert Humphrey, investi de manière chaotique pendant l'été par le Parti démocrate, avait été battu par le républicain Richard Nixon.
"A l'écart"
"Je me tiendrai à l'écart (de la campagne), mais je ferai tout ce que je peux pour aider", a promis Joe Biden.
Kamala Harris ne se reposera certainement pas outre mesure sur ce président généralement impopulaire, dans une course extrêmement indécise.
Et ce même si la cote de confiance de Joe Biden a rebondi depuis qu'il a renoncé à briguer un second mandat.
La vice-présidente "a besoin qu'il confirme en quelque sorte qu'elle est prête pour le poste et qu'elle est solide. Mais elle a aussi besoin de prendre un peu de champ", souligne Rebecca Gill, professeure de sciences politiques à l'université du Nevada.
Selon elle, c'est surtout auprès des sympathisants républicains modérés, hostiles à Donald Trump, et des indépendants qu'une trop grande proximité avec le président pourrait nuire à la démocrate.
"Je sais que cela semble très étrange de dire que personne ne connaît la vice-présidente des Etats-Unis. Les gens connaissent certes son nom, mais ce poste ne donne pas lieu à la même couverture médiatique constante que celui de président", rappelle Rebecca Gill.
"Mettre Biden en avant pourrait perturber cette phase dans laquelle beaucoup d'électeurs sont en train de faire connaissance avec Kamala Harris".