La popularité de certains athlètes en Chine, catalysée par les réseaux sociaux, a entraîné l'apparition de communautés d'admirateurs, aux agissements parfois excessifs qui débordent sur la vie privée des athlètes.
La jeune star Quan Hongchan (17 ans, 1m50), double médaillée d'or à Paris en plongeon après avoir été déjà championne olympique à Tokyo, jouit désormais d'une énorme popularité sur internet.
Une célébrité qui entraîne sur son passage des attroupements dignes de stars de la chanson... mais qui sont parfois envahissants.
Les curieux sont si nombreux à se presser dans son village de la province du Guangdong (sud) que l'adolescente a renoncé à rentrer chez elle après les Jeux.
Et ces derniers jours, lors d'une visite de la délégation olympique chinoise à Macao (sud de la Chine), Quan Hongchan a été photographiée en larmes après avoir été suivie jusqu'à son hôtel et entourée par une armée d'admirateurs.
Le gymnaste Zhang Boheng, lui, a dû se réfugier dans les toilettes de l'aéroport de Pékin pour échapper à ses fans en délire.
Comment expliquer ces excès?
Pour Jian Xu, professeur à l'université Deakin en Australie, le fait que les sportifs participent de plus en plus à des émissions de télévision et des événements en ligne a fait d'eux des célébrités.
Internaute arrêtée
Résultat selon lui: leur vie est devenue une sorte de "divertissement" pour le grand public.
Pour le meilleur comme pour le pire. Car si certains sont vus comme des héros nationaux, d'autres sont victimes d'attaques sur internet.
Le gymnaste Su Weide, 24 ans, a ainsi été insulté sur les réseaux sociaux après avoir chuté deux fois lors de l'épreuve de barre fixe à Paris.
"Il a entraîné toute l'équipe dans sa chute", l'a critiqué un utilisateur du réseau social Weibo, où d'autres l'ont accusé d'avoir gagné sa place grâce à ses "relations" plutôt qu'à son talent.
La déraison de certains fans a été encore plus évidente durant la finale 100% chinoise du simple dames de tennis de table des JO-2024 entre Chen Meng (30 ans) et Sun Yingsha (23 ans).
Cette dernière a reçu un soutien appuyé des spectateurs et internautes, tandis que son aînée, bien moins populaire, a été vilipendée par le public et de nombreux utilisateurs des réseaux sociaux.
Quelques jours plus tard, la police a annoncé l'interpellation d'une internaute qui avait publié un message insultant.
Depuis, au moins cinq personnes ont été arrêtées ou sanctionnées pour avoir insulté sur internet des sportifs ou des entraîneurs chinois, dans le cadre de cette lutte contre les excès de certains fans.
Pan Zhanle, le nageur de 20 ans qui a pulvérisé le record du monde du 100 m nage libre en décrochant l'or à Paris, a depuis sa victoire dissous son fan-club officiel sur Weibo.
"Vision correcte"
Les membres de ces clubs en ligne ont souvent une loyauté totale pour leurs idoles, dont ils prennent la défense et promeuvent la carrière... au point parfois de dénigrer ceux qui leur font de l'ombre.
Selon le professeur Jian Xu, beaucoup de jeunes Chinois se sont tournés vers les sportifs après le renforcement en 2021 de la surveillance par les autorités des fan-clubs de célébrités du cinéma et de la musique - des groupes coupables eux aussi à l'époque de certains excès.
Les fans pensaient alors que le sport était "un domaine relativement sûr" en raison de son importance "pour la nation", indique Jian Xu.
"Ils peuvent exprimer leur fierté et leur patriotisme en soutenant leurs idoles sportives", souligne-t-il.
Mais les autorités semblent aujourd'hui penser que cet enthousiasme va trop loin.
L'Administration générale du sport, principal organe régissant le sport en Chine, a condamné la semaine dernière les excès de ces fan-clubs qui "nuisent à la réputation du milieu du sport".
Son directeur Gao Zhidan a appelé les sportifs eux-mêmes à jouer leur rôle d'exemple pour la jeunesse en ayant "une vision correcte de la vie" et "une vision rationnelle de la célébrité et de la fortune".