L'Arena Paris Sud 4 est une cocotte minute de 6.650 places, qui fait beaucoup de bruit depuis le début des épreuves de tennis de table. Mais quand les Lebrun jouent, le boucan est d'enfer et ne faiblit pas.
"Quel pied!", lâchait lundi Alexis, 20 ans, tout juste qualifié pour les 8e de finale du simple hommes, désormais bien acclimaté à l'ambiance dingue qui lui "avait mis une claque" l'avant-veille.
"C'est galvanisant à mort", soutenait Félix, 17 ans, heureux d'avoir trouvé un regain d'énergie grâce aux fans, pour remporter son 16e de finale devenu compliqué sur la fin.
Un vacarme de tous les diables qui oblige parfois les autres joueurs, un tantinet éberlués, à attendre que ça redescende pour reprendre leur partie, des "Marseillaises" à n'en plus finir, des pieds qui tapent à en faire trembler les tribunes...
Même la délégation chinoise semble ne pas en revenir. "Leurs supporteurs savent pourtant être bruyants", dit un membre de la Fédération internationale.
"Sympas", "simples", "bankables"
"Oui, mais là-bas, le rituel d'encouragements est très normé. Ici, il n'y a rien de normé... c'est la France", complète, dans un sourire entendu, Nathanaël Molin, l'entraîneur des deux frangins.
A Paris, le public est à parts égales composé de fans et de non initiés. Beaucoup ont acheté des billets par curiosité, après voir entendu parler des Lebrun, et s'en trouvent conquis.
Les mêmes raisons reviennent, résumées par Joëlle, quinquagénaire, venue en famille: "ils sont sympas, on a envie de les supporter, et puis ils sont forts quand même".
Pour Gilles Erb, président de la Fédération française, "d'abord, c'est leur talent incroyable qui est apprécié. Ensuite, les gens se reconnaissent en eux, parce que ce sont des gamins qui sont simples, qui ressemblent à tout le monde".
L'image renvoyée par les comètes Lebrun les rend "bankables". Impossible de passer à côté de leurs têtes blondes, jusqu'à la télé où défilent des spots publicitaires les mettant en scène, ici pour une enseigne de grande distribution, là pour un fabricant de jeux vidéo.
Précédés de tous les superlatifs, les Montpelliérains concentrent de vifs espoirs de médaille française dans une discipline qui cherche des successeurs à Jean-Philippe Gatien et Patrick Chila.
Le premier avait décroché l'argent en simple à Barcelone-1992, puis le bronze en double avec le second à Sydney-2000. De quoi booster une pratique à laquelle tout le monde s'est un jour essayé au camping, à l'école ou dans le parc d'à-côté.
Griezmann, Halliburton sont fans
"Mais là, l'engouement est sans précédent. Ce qui est dingue car pour l'instant Félix et Alexis ne sont pas médaillés... Mais les réseaux sociaux font que c'est multiplié par mille... Tout le monde les connaît", éclaire leur oncle Christophe Legoût, ancien 14e mondial et actuel directeur sportif de la FFTT.
Le nombre de licenciés grossit. Pour la saison 2023-2024, on en compte plus de 228.000 (+7,5%). "Les Jeux offrent une sacré exposition. Alors, s'il y a en plus une médaille, ça peut être un raz de marée", anticipe Christophe Legoût.
Leur notoriété est aussi très grande en Chine où chacun possède son compte Weibo.
Et l'emballement gagne d'autres sportifs célèbres, tel Antoine Griezmann, se demandant sur X, "Il dit quoi Alexis après chaque point? Essai? Eussai!? Assez? Il est trop fort!". Réponse directe de l'intéressé: "A la base c'était Tcho puis Tchosé ou Yosé puis après c'est parti en sucette. Merci beaucoup en tout cas. Si tu passes nous voir, j’essaierai d'en inventer un nouveau".
Mêmes des stars de la NBA, membres de Team USA, se montrent impressionnés. "Les frères Lebrun sont électriques", a tweeté lundi soir Tyrese Halliburton, Alexis le remerciant d'un modeste "Merci, continue à suivre le tennis de table".
"Je crois que c'est ça le truc. Ils restent naturels, ils ne se prennent pas pour ce qu'ils ne sont pas et c'est ça leur force", conclut Gilles Erb.