Énième contretemps pour le réacteur pressurisé européen (EPR) de Flamanville (Manche), dont le chantier cumule 12 ans de retard. Alors qu’il venait d’entériner son premier cycle, qui doit s’étaler jusqu’en 2026 et le remplacement du couvercle de la cuve en raison d’anomalies, ce réacteur présenté comme le plus puissant au monde a connu un «arrêt automatique» le 4 septembre.
«Ça prouve que le système de sécurité fonctionne bien», a indiqué à une agence de presse, le 4 septembre au soir, une porte-parole d’EDF, après avoir rapporté l’arrêt. Cette dernière a déclaré que les équipes de l’énergéticien procédaient «aux contrôles techniques et aux analyses nécessaires» avant la relance de la divergence, la réaction nucléaire qui génère une grande quantité de chaleur afin de produire à terme de l’électricité.
«Cet arrêt automatique est une sécurité», a insisté la directrice de la communication d’EDF, Stéphanie Schnebelen, citée ce 5 septembre par Ouest-France. «Nous sommes en phase de test et nous devons tester 1 500 critères de sûreté. Dès que quelque chose ne se passe pas comme prévu, le réacteur s’arrête pour qu’on puisse investiguer et comprendre ce qu’il s’est passé», a-t-elle développé.
Les antinucléaires, eux, font leurs choux gras de ce faux départ du dernier réacteur de Flamanville. «EDF a perdu de ses compétences en ingénierie, l’arrêt de l’EPR un jour seulement après son lancement est révélateur de l’état désastreux de l’industrie énergétique française», a dénoncé Yannick Rousselet, consultant en sûreté nucléaire pour Greenpeace.
Auprès du journal Ouest-France, ce membre de la Commission locale d’information assure que celle-ci a reçu des informations concernant cet arrêt et pointe une erreur humaine.
Cette mise en arrêt d’urgence de l’EPR «concernait les compteurs de flux neutroniques», a-t-il déclaré au quotidien régional. «Dans ce cadre, un ordinateur a été branché sur un module du contrôle commande pour injection d’un nouveau paramètre. Lors de cette action, un intervenant a oublié deux étapes informatiques. Du coup, le système de protection s’est activé et a donné l’ordre d’arrêt automatique du réacteur», a développé cet écologiste originaire du Cotentin et mobilisé depuis 48 ans contre la centrale de Flamanville.
Si EDF est habitué à redémarrer des réacteurs nucléaires après des opérations de maintenance, c’est la première fois depuis 25 ans qu’un tout nouveau réacteur est lancé en France. En effet, la dernière mise en service d’un nouveau réacteur dans l’Hexagone remonte à 1999. Il s’agissait de Civaux 2 (Vienne), ultime tranche du plan Messmer… annoncé en 1974.
Le 3 septembre, EDF avait annoncé que l’EPR de Flamanville avait réalisé la première fission nucléaire. Au final, il aura fallu une quinzaine d'heures pour atteindre cet état de divergence, à «15h54», avait précisé l’énergéticien français. La veille, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), le gendarme français du nucléaire, avait donné son feu vert à la production des premiers électrons.
Le même jour, EDF annonçait un nouveau retard dans la mise en service de son EPR, avec un raccordement au réseau électrique reporté à «la fin de l’automne», contre jusqu’alors la fin de l’été, soit le 21 septembre au plus tard.
«L'EPR, et l'EPR 2 qui sera construit aussi en France plus tard, ont fait le choix d'une grande puissance, ce qui permet d'optimiser les coûts de production et d'être peu cher», déclarait mi-mai à une radio locale, à l’occasion d’une visite du président Macron sur le chantier, le directeur de l'information de la Société française d'énergie nucléaire (SFEN) Ludovic Dupin, défendant ce choix face à la concurrence asiatique, notamment russe.