Cette étude va faire pleurnicher dans les chaumières féministes qui vont y voir une nouvelle preuve que l’infâme patriarcat et les « stéréotypes de genre », comme on dit dans la novlangue sociologique, ont la vie dure. Il ne s’agit pas d’un vague sondage, mais d’une sérieuse et vaste enquête menée depuis six ans, avec des données concernant 100 000 couples hétérosexuels. Elle est publiée en anglais dans une grande revue de démographie[1].
Pour ne pas vous assommer de chiffres, je résume : quand une femme gagne plus que son conjoint, le risque de divorce est plus élevé que quand c’est le contraire. Et plus l’écart augmente, plus ce risque augmente… Cela se constate à tous les âges, et c’est encore plus marqué chez les faibles revenus.
Pour le féminisme contemporain consistant essentiellement à démontrer que les femmes sont les chouchoutes du malheur (asservies, agressées, sous-payées, humiliées etc.), la conclusion est donc évidente : ces messieurs, qui se prennent toujours pour des pater familias tout puissants, supportent mal que leurs femmes réussissent mieux qu’eux (à supposer déjà que la réussite se mesure au revenu…).
C’est d’ailleurs la même interprétation qui est privilégiée par l’INED, lequel observe des difficultés conjugales chez « ces couples hors-norme » qui ne suivent pas le modèle dominant de l’homme « gagne-pain ». Les résultats indiquent clairement que « dévier des normes est difficile à accepter même dans des pays comme la France où l’emploi féminin est élevé et soutenu par des politiques familiales ».
C’est cette interprétation qui est sexiste. Comme si les femmes subissaient toujours tout ce qui leur arrive ! Une femme qui gagne plus « encourt le risque » de séparation, écrit ainsi le site progressiste du HuffPost en commentant l’étude. Comme si le divorce était une punition réservée aux femmes !
En réalité, la plupart du temps, ce sont les femmes qui partent. Les hommes sont peut-être un peu plus lâches, allez savoir… Peut-être aussi que certaines femmes sont vénales, après tout. Peut-être les femmes sont-elles plus enclines à divorcer, quand leur conjoint gagne moins et ne peut pas les couvrir de bijoux, qui sait ? D’ailleurs, l’INED l’envisage, mais au conditionnel. Une autre possible interprétation viendrait des femmes financièrement plus dotées que leur conjoint pour qui la séparation pourrait être plus envisageable en cas d’insatisfaction conjugale.
Mais surtout, aujourd’hui, un tiers des femmes gagnent plus ou autant que leur conjoint et dans 20 ans, étant donné les niveaux de diplômes et la présence féminine dans les universités, ce sera le contraire. Plus autonomes financièrement, les femmes sont donc plus libres. Libres de partir quand elles veulent. C’est donc en réalité une bonne nouvelle. Et c’est pour ça que ça hérisse les féministes, qui n’aiment jamais les bonnes nouvelles.
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[1] https://archined.ined.fr/view/nx-eJZABuUAJ5jvNq7yK
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