Notre époque veut croire qu'elle a tout inventé, qu'il n'existait rien avant elle, et pire: qu'elle englobe toutes les autres. C'est particulièrement faux dans le domaine de l'amour où tout, ou presque, fut déjà dit et inventé il y a déjà bien longtemps. Comment évoquer la passion amoureuse lorsqu'on a lu
Proust,
les philosophes grecs ou
Casanova? Ce dernier, d'ailleurs, dans
Histoire de ma vie, écrit: «Une fille qui, par le peu qu'elle laisse voir à un homme, le fait devenir curieux de voir le reste, a déjà fait trois quarts du chemin qu'il lui faut faire pour le rendre amoureux.» L'ethnopsychiatre Tobie Nathan ne dit pas autre chose dans son ouvrage, Philtre d'amour,
publié en 2013 aux éditions Odile Jacob: «La passion amoureuse est le résultat d'une manipulation. (…) On ne tombe pas amoureux au gré des rencontres, charmé par un corps harmonieux, un doux visage ou une belle âme, mais parce qu’on a été l’objet d’une capture délibérée.»
Il détaille les procédés nécessaires à cette capture: «Objets magiques, philtres, parfums, prières, rites, paroles ésotériques, nourritures ou boissons préparées…» Avec un bon manuel, donc, chacun pourrait provoquer l'amour de l'autre? Si seulement... «Jusqu'au XVIIIe siècle, nous pensions que l'amour, ça se déclenche. Je parle de la passion amoureuse, de la
philia... Pour cela, il y a des objets, des façons de faire, des nourritures, des substances»,
rembobine Tobie Nathan. En ...
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