La CIA a mené des expériences utilisant des drogues, l'hypnose, l'isolement, la privation sensorielle et d'autres méthodes extrêmes sur des êtres humains dans les années 1950 et 1960, selon les Archives de la Sécurité nationale des États-Unis.
Les programmes portaient les noms de code suivants : MKULTRA, BLUEBIRD et ARTICHOKE. Les cobayes étaient des citoyens des États-Unis et d'autres pays, qui participaient souvent de façon inconsciente aux expériences de la CIA.
Parmi les documents clés sont à signaler :
1. Un plan visant à créer des équipes d'interrogatoire qui «utiliseraient le polygraphe, les drogues et l'hypnose pour obtenir les meilleurs résultats en matière de techniques d'interrogatoire», approuvé par le directeur de la CIA en 1950.
2. Un rapport de 1952 sur l'utilisation «réussie» des techniques d'interrogatoire ARTICHOKE qui combinaient l'utilisation de l’«anesthésie» et de l'«hypnose» pour induire la régression et plus tard l'amnésie sur des «agents russes soupçonnés de double jeu».
3. Une note de service datée de 1956 dans laquelle le responsable du projet MKULTRA, Sidney Gottlieb, approuve un projet visant à «évaluer les effets de fortes doses de LSD-25 chez des volontaires humains normaux» parmi les détenus d'une prison fédérale d'Atlanta, en Géorgie.
4. Un rapport de 1963 de l'inspecteur général de la CIA John Earman, qui indique que dans la phase finale des expériences, des drogues ont été administrées à des «sujets inconscients dans des conditions de vie normales». Ce rapport précise également que la conduite d'expériences «conformément aux procédures scientifiques reconnues ne permet pas de dresser un tableau complet des réactions et des attributions susceptibles de se produire dans des situations opérationnelles». C'est pourquoi «en 1955, un programme d'essais clandestins de substances sur des citoyens américains à leur insu a été lancé». Certains des sujets testés étaient des «informateurs ou des criminels présumés», tandis que d'autres sujets involontaires provenaient de différents milieux. John Earman a recommandé que les tests de substances sur des citoyens américains inconscients de leur participation soient interrompus en raison du risque de compromission et de préjudice pour la CIA. Toutefois, selon lui, de telles expériences pourraient être menées avec des «agents profondément conspirateurs à l'étranger».
Les expériences ont été menées non seulement dans des hôpitaux, des laboratoires et d'autres institutions, mais aussi dans des maisons secrètes. Par exemple, l'agent fédéral George Hunter White, se faisant passer pour un artiste bohème sous le pseudonyme de Morgan Hall, attirait des victimes dans «son appartement» où lui et d'autres agents de la CIA leur injectaient des drogues et enregistraient leurs réactions.
Ce dernier document mentionne qu'en 1960, il n’existait pas de «somnifère efficace, de sérum de vérité, d’aphrodisiaque ou de pilule pour recruter», mais que des progrès avaient été réalisés dans l'utilisation de drogues pour les procédures d'interrogatoire.
Alors que certains professionnels de la Santé employés par la CIA se sont apparemment heurtés aux questions éthiques soulevées par la réalisation de tests nocifs sur des personnes qui n’étaient pas au courant de toutes ces expériences, d'autres ont cherché à participer à un programme dans lequel, selon une note de service de 1953, «aucun domaine de l'esprit humain ne doit rester inexploré».
Dans la publication des Archives de la Sécurité nationale, les expériences sont décrites comme terrifiantes, honteuses et offensantes, et tous les documents sont compilés dans un «récit troublant sur les efforts à long terme de la CIA pour découvrir et tester des moyens d’effacer et de reprogrammer l’esprit humain», et de le contrôler.