Le principal parti d’opposition en Corée du Sud a annoncé mardi 24 décembre son intention de faire destituer par le Parlement le Premier ministre et président par intérim Han Duck-soo pour son refus de promulguer deux lois visant à enquêter sur le président déchu Yoon Suk-yeol. Le Parti démocrate avait donné jusqu’à mardi au Premier ministre pour promulguer ces deux lois visant à créer des commissions d’enquête indépendantes spéciales, l’une sur la tentative ratée de Yoon Suk-yeol d’imposer la loi martiale et de museler le Parlement en y envoyant l’armée le 3 décembre, et l’autre sur des accusations de corruption contre son épouse, Kim Keon-hee.
Lors d’un conseil des ministres mardi, Han Duck-soo, président par intérim depuis la destitution de Yoon Suk-yeol par le Parlement le 14 décembre, a annoncé qu’il refusait d’accéder à la demande de l’opposition, estimant que de telles lois devaient faire l’objet d’un consensus entre les partis. "Nous n’avons d’autre choix que d’interpréter cela comme une intention de sa part de poursuivre la rébellion au moyen de manœuvres dilatoires", a déclaré le chef de l’opposition à l’Assemblée nationale, Park Chan-dae, au cours d’une conférence de presse.
Après avoir indiqué vouloir déposer une motion en ce sens dès mardi, il a finalement précisé en fin de journée avoir décidé d’attendre jeudi. Si cette procédure réussit, il s’agira de la première destitution d’un président par intérim après celle du président titulaire dans l’histoire de la Corée du Sud.
La Constitution sud-coréenne dispose que l’Assemblée nationale peut destituer le président par un vote à la majorité des deux tiers, et le Premier ministre et autres membres du gouvernement à la majorité simple. L’opposition, qui dispose de 192 sièges sur 300 à l’Assemblée, affirme n’avoir besoin que d’une majorité simple pour déposer Han Duck-soo, puisqu’il n’est que Premier ministre. Le Parti du pouvoir au peuple (PPP), la formation au pouvoir, soutient au contraire qu’une majorité des deux tiers est nécessaire, puisque Han Duck-soo est président par intérim.
Yoon Suk-yeol, suspendu, reste officiellement le président du pays en attendant un arrêt de la Cour constitutionnelle confirmant ou infirmant la décision des députés. Il est par ailleurs sous le coup d’une enquête conjointe de la police, du ministère de la Défense et de l’agence anticorruption pour "rébellion", un crime passible de la peine de mort.
Le Bureau d’enquête sur la corruption, qui centralise les investigations, l’a convoqué pour un premier interrogatoire le 25 décembre à 10h00 (02h00 heure française) sur ces événements qui ont sidéré le pays. Mais le Bureau a annoncé lundi que ses convocations, expédiées par la poste à la fois au domicile et au bureau de Yoon Suk-yeol, avaient été refusées par le destinataire. Un courrier électronique est également revenu à son expéditeur sans que l’on puisse déterminer s’il avait été lu ou non. Au cas où Yoon Suk-yeol refuserait à nouveau de comparaître le 25 décembre, le Bureau d’enquête a le choix entre envoyer une troisième convocation ou demander à la justice un mandat d’amener.