C’est peu dire que la nouvelle identité de Jaguar suscite l’émoi. A peine un coin du voile avait-il été levé, fin novembre, que les réseaux sociaux s’enflammaient. La signature, d’abord, à la typographie douce, mêlant majuscules et minuscules, alliant géométrie, symétrie et simplicité, se veut l’expression "d’une puissante célébration du modernisme". Le monogramme, ensuite, intègre les lettres "j" et "r" dans un cercle de laiton, en référence aux codes des maisons de haute couture. Cet ornement discret habillera l’habitacle et le cœur des jantes. Le logo, enfin, inscrit l’emblématique félin "bondissant vers l’avenir" sur un graphisme linéaire apposé sur la carrosserie.
"Nous voulons engager une expérience émotionnelle forte", déclare Rowdon Glover, directeur général de la marque. Pari réussi tant les puristes se sont émus d’une telle transformation. "Nous avons opté pour un luxe moderne, sans cesse en mouvement, à la différence du luxe traditionnel qui se définit par un équilibre entre le rationnel et la valeur du premium", poursuit Rowdon Glover. Et pour mieux ancrer sa métamorphose "construite autour du modernisme exubérant, audacieuse et artistique dans chacune de ses expressions", selon Gerry McGovern, directeur de la création du groupe JLR, le constructeur a choisi la Miami Art Week pour dévoiler le concept né de cette nouvelle philosophie. C’est en avant-première de la grand-messe de l’art contemporain que la Type 00 a illustré la vision du design des prochaines Jaguar.
Fidèle au leitmotiv de son fondateur, Sir William Lyons, "ne rien copier", la marque a conçu "une réinvention qui capture l’essence de Jaguar en revenant aux valeurs qui l’ont autrefois rendue si désirée, tout en la rendant pertinente pour une audience contemporaine", souligne Gerry McGovern. Il en résulte une sculpture aux dimensions plantureuses, à la silhouette élancée, dotée d’un long capot, d’une ligne de toit qui descend de façon continue jusqu’au coffre - la fameuse fastback qui induit l’effet de vitesse - d’une calandre imposante tandis que l’arrière évoque "une poupe de bateau. Le contraste entre l’avant et l’arrière mise sur l’alliage de la puissance et de la douceur vintage", souligne Richard Stevens, directeur du design du groupe JLR.
La face avant associe des surfaces droites et affleurantes et lui confère stature et ancrage. Le hayon, tout en arrondi, est agrémenté du graphisme linéaire dans lequel sont encastrés des feux arrière impressionnants. Le célèbre félin britannique, découpé au laser dans des lingots de laiton polis à la main, s’affiche de chaque côté de la voiture et intègre des caméras de recul. "La Type 00, par ses proportions brutales, reflète l’esprit de la créativité et de l’originalité britanniques. Elle célèbre l’art", résume Constantino Segui Gilabert, responsable du design extérieur.
Tout à son inspiration artistique, Jaguar laisse exploser les couleurs. "Il faut puiser dans les coloris pour jouer sur la silhouette et l’émotion", insiste Rowdon Glover. A Miami, les modèles exposés se drapent de rose, en rappel des pastels de l’architecture Art Deco de la ville et de la patine du laiton, ainsi que d’un bleu inspiré du "Opalescent Silver Blue" des années 1960, clin d’œil aux racines britanniques de la marque.
Par contraste, l’atmosphère intérieure du véhicule apaise ses passagers. Les écrans glissent silencieusement sur la planche de bord, les espaces de rangement motorisés s’ouvrent avec douceur, un mélange de laine tactile enveloppe les sièges et le plancher. Trois lignes en laiton parcourent la longueur de l’habitacle et une colonne du même alliage sépare deux tableaux de bord flottants. La pierre de travertin, aux vertus thermiques et acoustiques, soutient les fauteuils et la colonne centrale. Comble du raffinement, un coffret de trois totems en laiton, travertin et albâtre permet de personnaliser l’ambiance au grès de l’humeur des occupants : éclairage, univers sonore, parfum.
A partir de ce prototype, les ingénieurs déclineront trois modèles sans perdre de vue la pureté du design. Une première voiture de série, une GT quatre portes fabriquée au Royaume-Uni, sera présentée fin 2025. Pour son virage à 100 % électrique, le britannique a défini une architecture qui offre une autonomie de 692 à 770 kilomètres d’autonomie, avec une charge rapide de 320 kilomètres en quinze minutes. "Le couple électrique est important et produit des sensations tout aussi sportives que les motorisations thermiques", souligne Philippe Robbrecht, président directeur général de JLR France.
"Notre écosystème doit refléter et légitimer notre montée en gamme et notre positionnement dans le domaine du luxe, explique Rowdon Glover, directeur général de Jaguar. Nous ne nous sommes pas contenter d’élaborer une architecture sur une nouvelle plateforme et d’augmenter les prix". Cette nouvelle expérience client se traduira par le déploiement de boutiques exclusives dont la première ouvrira au cœur du Triangle d’or des Champs-Élysées. Le constructeur vise désormais "une clientèle plus jeune, plus indépendante, plus connectée". Et émotionnellement plus engagée.
