Les jeux sont faits, la messe est dite et Madame Hidalgo, à l’en croire, tiendrait là son bilan. Les jeux, ce sont les olympiques, bien sûr. La messe, celle solennelle, inaugurale, qui sera célébrée à Notre Dame ce samedi 7 décembre en présence d’une forte affluence de très hautes personnalités françaises et étrangères des mondes religieux, politique, culturel, à l’exception notable de Sa Sainteté le pape François, celui-ci ayant préféré l’Île de Beauté à l’île de sainteté que sera, ce jour-là au moins, celle où se dresse la cathédrale phare de sa propre religion et qui, de plus, se trouve être dédiée à Saint-Louis.
Il n’en reste pas moins que, en ces deux circonstances, les jeux olympiques et la restauration si flamboyante de Notre Dame, Paris aura été aux yeux du monde à son plus beau. L’entourage, la cour de Madame Hidalgo sur le départ, dans leur message d’amitié et de congratulation, ne semblent vouloir retenir de sa décennie municipale que ces parenthèses enchantées, notamment celle des jeux.
Sans doute la Maire de Paris a-t-elle sa part dans ces réussites. Sans doute les a-t-elle accompagnées avec entrain. On ne discutera pas ce point, naturellement.
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Mais Paris n’est pas que l’embellie des jeux et la prouesse d’un formidable chantier de résurrection. Il y a le reste, tout le reste. Les effets de la frénésie cyclophile de l’édile qui entend manifestement que tout dans sa ville, aller, venir, se déplacer, se fasse désormais au mollet. Avec, en agrément, un gymkhana perpétuel entre les barrières de travaux, les trous, les bosses, éventuellement les poubelles, etc. Pour le provincial que je suis, entrer dans Paris en voiture est devenu l’aventure suprême. Je n’oublie pas d’emporter des vivres avec moi et de me munir de pilules anti-stress. Je sais pertinemment que je pourrais m’adresser pour ce genre de produit à l’un de ces commerçants à la sauvette qui sont de plus en nombre dans la cité hidalgienne, mais on me dit que la qualité n’est ni suivie ni sûre. Un troisième mandat aurait sans doute permis à madame Hidalgo de s’occuper de la question. À suivre… Les vivres que j’ai emportés, j’évite de les consommer sur un banc des Tuileries ou ailleurs. Rapport aux rats, vous voyez. Ils ne vendent rien à la sauvette mais ils sont encore plus nombreux que ces marchands. C’est dire… Ici, on use à présent de leur nom officiel, surmulot. C’est tout aussi dégoûtant, redoutable, porteur de saloperies, mais c’est plus noble et surtout davantage marqué de bienveillance envers l’espèce animale. Le surmulot, donc, trouve à se loger et proliférer à son aise à travers Paris. Tel n’est pas le lot du foyer aux revenus moyens, voire moyens supérieurs. Pour celui-là, habiter Paris est encore un peu plus irréalisable que voilà dix ans, à l’arrivée de la dame. En fait, il faut bien comprendre qu’une forme de progrès s’amorce ainsi. Lorsque Paris ne sera plus peuplé que de gens ayant vraiment les moyens, pour qui l’automobile sera devenue une bizarrerie ringarde bonne à laisser aux culs-terreux et aux prolos végétant hors les murs, la capitale de la France ne sera pas loin d’être devenue le Paradis dont rêve madame la maire en partance. Autre traduction dans les faits du beau souci écologique et hygiéniste de l’élue, le camping de plein air ne cesse de se développer, en particulier dans les quartiers, nord nord-ouest. On notera, détail digne d’intérêt, voire d’éloge, la forte ouverture à l’international de la pratique. On y vient d’au-delà des mers, ce qui ne participe pas peu à la prospérité du commerce ambulant évoqué ci-dessus. Des agents du complotisme le plus réactionnaire feraient courir le bruit qu’une esquisse de commencement de délinquance serait liée à tout cela. Or, les études extrêmement scientifiques diligentées par les services de la maire sont encore hésitants dans l’interprétation des courbes et des statistiques obligeamment mises à leur disposition. Bouger ses fesses pour aller voir dans la rue ce qu’on y voit, ce qu’on y constate étant tout ce que l’on veut, sauf scientifique, bien entendu, ils s’en abstiennent. Dormez bonnes, gens !
Donc madame Hidalgo s’en va. Nul doute qu’elle ne trouve rapidement un autre lieu de pouvoir, d’influence où exercer ses remarquables talents. Un boulot pas trop loin, pour pouvoir y aller à vélo. Puis quelqu’un d’autre s’installera dans son fauteuil. Elle a désigné un successeur, lui aussi, nous dit-on, cyclophile impétinent. Normal pour ces gens. L’actuelle élue est arrivée là sur le porte-bagage de Bertrand Delanoë, le potentiel successeur y débarquerait sur le sien. Tout cela est d’une logique admirable. On verra bien. Et puis, comme on dit depuis des lustres et des lustres, Paris sera toujours Paris. Dont acte. Mais en un peu plus propre, ce ne serait déjà pas si mal.
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