À Niamey, les autorités de régulation des télécommunications du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont signé ce jeudi 21 novembre un protocole d’accord supprimant les frais d’itinérance («roaming») pour les appels vocaux et les SMS. Cette initiative, destinée à améliorer la mobilité et la communication entre les citoyens des trois pays, est une avancée majeure pour l’intégration numérique et sociale au sein de l’Alliance des États du Sahel (AES).
Selon les propos du secrétaire exécutif de l’Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes (ARCEP) du Burkina Faso rapportés par l'AFP : «L’adoption de ce protocole offrira aux concitoyens la possibilité de communiquer sans le poids du surcoût d’itinérance qui freine la mobilité et les liens entre les peuples.» Le protocole, qui établit la gratuité de la réception des appels et des SMS en itinérance, a été salué comme une étape stratégique pour améliorer la connectivité et soutenir le développement socio-économique au sein de la zone AES.
Cet accord s’inscrit dans le cadre des efforts de coopération entre les trois pays, regroupant 72 millions d’habitants. Outre l’intégration numérique, cette union vise à renforcer leur autonomie politique et économique, notamment en s’éloignant de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), accusée par ces nations d’être influencée par d’anciennes puissances coloniales comme la France. Michel Yaovi Galley, directeur général de l’ARCEP Togo, invité à Niamey en tant que représentant d’un «pays frère», a exprimé son enthousiasme pour un futur accord similaire avec son pays, le Togo : «Supprimer ces barrières, c’est affirmer notre volonté d’œuvrer pour un monde connecté où les frontières géographiques ne signifient plus de limite technologique.»
Le protocole sur le «free roaming» s’inscrit dans une dynamique régionale initiée dès 2016, lorsque le Mali et le Burkina Faso, avec plusieurs autres pays ouest-africains, avaient adopté des mesures similaires pour faciliter la communication entre leurs citoyens. Cependant, l’accord signé à Niamey symbolise une volonté d’approfondir la coopération entre les membres de l’AES et de bâtir une infrastructure numérique autonome. Le ministre nigérien de la Communication, Sidi Mohamed Raliou, a qualifié cette initiative de : «tournant stratégique pour l’intégration numérique et une réponse aux attentes de nos citoyens.»
Au-delà de l’aspect technique, cet accord reflète la stratégie des gouvernements militaires du Mali, du Niger et du Burkina Faso, qui cherchent à renforcer leur coopération face aux défis communs. Ces trois pays, dirigés par des régimes militaires depuis des coups d’État successifs, se sont éloignés de leurs voisins membres de la CEDEAO, accusés de déstabilisation. En parallèle, les dirigeants de l’AES ont intensifié leur rapprochement avec Moscou, marquant un changement notable dans leurs alliances géopolitiques.
La suppression des frais d’itinérance au sein de l’AES s’inscrit dans une vision à long terme d’intégration régionale, centrée sur une coopération renforcée entre ses membres. Ce projet s’accompagne d’un retrait progressif des organisations ouest-africaines traditionnelles comme la CEDEAO, soulignant une volonté d’autonomie et de redéfinition des alliances économiques et stratégiques dans la région.