Nicolas Baverez vient de publier Sursaut, un essai qui prolonge son travail de vigie du déclin français, entamé avec La France qui tombe en 2003. Soupçonné par les ricaneurs d’avoir inventé la « déclinologie », qui serait à l’économie ce que l’astrologie serait à l’astronomie, il semblerait pourtant qu’il ait eu à peu près raison sur tout. Déficits, éducation, insécurité, innovation, immigration : le modèle social gaulois à crédit comate en phase terminale. Le village Potemkine de la radiotélévision publique a beau nous vanter l’attractivité de la France, la start-up nation se bat désormais, non pour conserver un quelconque savoir-faire dans le numérique, mais pour que la production du Doliprane reste en France. Si l’on ajoute à cela le fait que nous sommes devenus l’un des plus gros exportateurs mondiaux de pommes de terre, cela donne une idée de nos ambitions. France Inter ne nous alerte cependant pas sur la chute du PIB par tête – nous sommes désormais talonnés… par la République tchèque ! Ceux qui se souviennent de l’image de dénuement de la Tchécoslovaquie avant la chute du mur de Berlin expliqueront aux ravis de la crèche l’effarement que cela devrait susciter. Baverez tente de rejouer le match Aron-Sartre, avec à ma droite, lui-même, et à ma gauche, tous les tenants de la sacro-sainte « dépense publique » (soit du NFP au RN en passant par les LR !). Pour faire admettre aux Français la purge libérale qu’ils méritent depuis une trentaine d’années, l’essayiste en appelle au sursaut des Français, au nom de l’intérêt général. Hélas, ce concept paraît aussi mort que feu Raymond. La France archipellisée décrite par Jérôme Fourquet n’a que des intérêts particuliers à défendre, à commencer par les deux millions de fonctionnaires surnuméraires, défendus par de puissants syndicats. Ces corporations considèrent désormais le déclin comme un avantage acquis et s’y accrocheront quoi qu’il en coûte (aux autres). Il ne faudra pas trop compter non plus sur cette nouvelle catégorie de Français qui détestent leur pays. C’est l’angle mort de ce brillant décliniste.
Éditions de l’Observatoire, octobre 2024. 192 pages.
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