Il est loquace, à l’audience correctionnelle du tribunal de Moulins, mercredi 2 octobre. Le prévenu de 21 ans se fait même porte-parole spontané de ses codétenus de la maison d’arrêt de Moulins-Yzeure.
Le 24 juin 2024, une quarantaine d’entre eux refuse de réintégrer les cellules. Pour la pénitentiaire, c’est une mutinerie, qui a notamment demandé la venue des équipes régionales d'intervention et de sécurité (Eris) de Lyon, mais aussi de Paris, pour que tout ce petit monde rentre, « dans le calme certes, mais avec l’usage de la force et c’est tout sauf anodin », souligne la procureure.
Des détenus refusent de regagner leurs cellules à la maison d'arrêt de Moulins-Yzeure
Les revendications : « On souhaitait avoir davantage de viande, voir les transferts facilités et davantage d’activités », détaille le prévenu, profitant de l’audience telle une tribune.
« On est enfermés 22 heures sur 24, si on part pas en promenade, c’est 24 heures sur 24. Il y en a qui voient leurs demandes de travail et d’activité refusées, comment faire pour prouver leur souhait de réinsertion ?
Ironie de la présidente du tribunal : « Vous avez un avenir dans la communication, monsieur, vous vous débrouillez bien. Mais il y a sans doute d’autres manières de revendiquer que de se mutiner, de dégrader. Une partie du grillage a été abîmée et un préau a été incendié, ce sont des coûts pour la société ».
Le prévenu ne se démonte pas : « Je vais payer. Mais comment faire pour se faire entendre, quoi qu’on fasse, on est toujours perdants ».
Réponse : « Déjà, on évite la détention. Vous êtes jeune et vous avez déjà un passif [vols avec violences et stupéfiants, dont une dernière peine ferme de trois ans, NDLR]. Vous avez mieux à faire ».
Des allers-retours derrière le grillageLui et un autre détenu étaient accusés d’avoir fait sauter quatre gros rivets qui tiennent une partie du grillage d’enceinte de la cour de promenade, puis d’avoir écarté le grillage. « Sur les images, on vous voit sortir dans une “zone neutre” et revenir. Vous faites plusieurs allers et retours ».
Hypothèse de la procureure : « Aller récupérer des colis ? », « une volonté de s’évader ? ». Le prévenu balaie les hypothèses (« je cherchais des cailloux »). On ne saura pas ce qu’il trafiquait, la fumée de l’incendie du préau empêchant de voir tout ce qui se tramait.
Suite à cette mutinerie, le jeune homme est allé en quartier disciplinaire. Son acolyte a vu ses demandes de remise de peine refusées, sans aucun aménagement. Lui a écopé de deux mois de prison supplémentaires (six mois requis) et l’obligation de rembourser les frais de réparation : 146,40 €. Et les revendications n’ont « pas abouti », admet le détenu.
Mathilde Duchatelle