L’idée trottait dans sa tête depuis plus de 30 ans. Depuis l’été de ses 18 ans exactement. « Avec des copains de l’école Boulle, on ne savait pas où partir en vacances. On a ouvert une carte, mis notre doigt au hasard, et cela nous a amenés à Mandailles. J’ai adoré ces paysages, et je me suis promis de retourner y vivre un jour. »
Mais la carrière de l’ébéniste, qui se fait un nom dans le monde du design, via plusieurs entreprises, dont les malles Maltier qu’il a récemment revendues, se situe longtemps à Paris, entre le 3e et le 10e arrondissement.Avant qu’il ne quitte la capitale, en 2021, direction l’île de Ré. « Tous mes meubles, les objets que je crée racontent une histoire. Je suis allé sur l’île de Ré parce que j’avais envie de faire une collection qui rappelle le mobilier de mes vacances d’enfant. Et j’ai pu travailler autour des marais salants. Avec par exemple une patère en métal, plongée dans ces marais, ce qui lui donne une patine rare. » Ou encore, en collaboration avec la céramiste Anne Merlet, un abat-jour en porcelaine en forme de seau de plage.
Pour l'inspirationPour sa collection suivante, il a voulu s’inspirer des Monts du Cantal. Prendre la direction de Murat était donc tout désigné.
Voir cette publication sur Instagram« Au-delà de ces paysages, qui m’inspirent et qui me ravissent, j’ai d’ailleurs du mal à croire que je vis là quand je me lève le matin, Murat est une ville de métier d’art, une petite cité de caractère, l’endroit était donc logique. Et puis le maire, Gille Chabrier, m’a beaucoup soutenu. Là, il m’aide à trouver un atelier. » Où il ne confectionnera pas que des meubles, « mais aussi des Tiny House, qui s’inspireront du bâti local. Et je pense qu’il y aura de la demande » lance celui qui peine à trouver une maison sur place. Mais qui en apprécie l’accueil :
ici, il y a une solidarité qui saute aux yeux. Quand je rencontre quelqu’un, il me présente toujours quelqu’un d’autre, me souffle l’idée d’un artisan avec qui je pourrais travailler. Je n’avais pas connu ça ailleurs, pas même à l’île de Ré.
Et puis, même si sa dernière entreprise, Maison Benoît Maltier, n’a qu’un an, celui qui travaille le bois comme l’acier a gagné, au fil de sa carrière, le droit de s’installer où il veut. « Aujourd’hui, je vends avec mon réseau, et les réseaux sociaux, le pas-de-porte ne compte pas. »
Pour transmetteEt puis, il ne s’installe pas ici que pour produire, mais aussi pour transmettre. Ce qui renvoie à son parcours. « Jeune, j’étais en échec scolaire. Mes parents m’ont alors inscrit en ébénisterie, et un prof m’en a donné le goût, ça a été une révélation. J’ai pu enchaîner sur l’école Boulle à Paris, puis Saint-Luc en Belgique, et percer dans ce métier. Aujourd’hui je voudrais rendre cela, au lycée du bois et de la montagne Joseph-Constant de Murat, et c’est aussi la volonté de son proviseur, Fabrice Lefort. C’est un bel établissement. J’aimerais faire profiter aux élèves de ce que je peux savoir, et accompagner la mise en valeur du lycée. »Depuis la rentrée, il enseigne donc l’ébénisterie.
Les étudiants ne s’attendaient pas forcément à travailler une approche design du bois. Mais l’idée, c’est de leur montrer qu’avec ce qu’ils apprennent en CAP, ils peuvent faire de grande chose. Il faut qu’ils aient confiance, qu’ils puissent croire en leur rêve.
Et, ce week-end, il organise une première manifestation. Dans le cadre de la France design week, et avec le soutien de l’association régionale Designer +, il présentera, ce samedi et ce dimanche, une sélection de ses pièces, mais aussi des réalisations des élèves, à l’hôtel de ville. L’occasion pour les locaux, qui devraient se presser en nombre dimanche pour la fête du cornet, de découvrir les œuvres de ce professionnel de renom, comme de ceux de demain.
Rendez-vous à l’hôtel de ville de Murat, samedi 14 et dimanche 15 septembre, de 9 heures à 19 heures.
Yann Bayssat