Tout juste nommé à Matignon, où il a promis "des changements et des ruptures", le nouveau Premier ministre Michel Barnier doit désormais s’atteler à composer un gouvernement susceptible de démontrer sa capacité à rassembler et à s’émanciper d’Emmanuel Macron.
Les infos à retenir
⇒ Castets : "Je suis très en colère"
⇒ Michel Barnier va recevoir Gabriel Attal puis les LR
⇒ Barnier : le "sectarisme" est une "preuve de faiblesse"
Invitée de la matinale de RTL, la candidate du Nouveau Front populaire a critiqué la nomination de Michel Barnier. "Je suis très en colère, c'est une trahison. Le président de la République se place en cohabitation avec le Rassemblement national. Nous censurerons le gouvernement Barnier", a-t-elle affirmé.
"Je suis très en colère, c'est une trahison. Le président de la République se place en cohabitation avec le Rassemblement national. Nous censurerons le gouvernement Barnier"@CastetsLucie dans #RTLMatin avec @ThomasSotto pic.twitter.com/Y8nJ7B61fd
— RTL France (@RTLFrance) September 6, 2024
Le Premier secrétaire du PS Olivier Faure s'est dit vendredi sûr "qu'aucune personnalité" de son parti n'entrera dans le gouvernement de Michel Barnier, confirmant que celui-ci ferait l'objet d'une motion de censure immédiate du Nouveau Front populaire. "Je pense qu'aucune personnalité du PS ne sera dans son gouvernement, je n'ai aucun doute là dessus", a déclaré Olivier Faure sur France inter.
.@faureolivier : "Nous n'étions pas prêts à simplement cautionner un casting, nous voulions savoir pour quoi faire. Les Français nous ont demandé à ce qu'on puisse remettre ce pays debout, ils n'ont pas demandé à avoir des noms." #le710Inter pic.twitter.com/eoHrVA7P3S
— France Inter (@franceinter) September 6, 2024
Il a confirmé que la gauche déposera une motion de censure car "le choix qui a été fait par le chef de l'Etat, c'est de se mettre au barycentre des droites et de l'extrême droite", ce qui est "une trahison démocratique" par rapport au résultat des législatives.
Sans attendre, Michel Barnier a multiplié les appels téléphoniques avant même sa prise de fonction, selon son entourage : Edouard Philippe, François Bayrou, Laurent Wauquiez, mais aussi Nicolas Sarkozy, ainsi que la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet et celui du Sénat Gérard Larcher.
Le nouveau locataire de Matignon a ses propres critères. "Il veut des ministres solides, compétents et efficaces", indique son entourage, et "il aura la liberté" de les choisir. Tout comme pour son directeur de cabinet, poste éminemment stratégique : "Ce sera M. Barnier seul et lui-même qui le décidera".
Comme pour mieux marquer ses distances avec le chef de l’Etat, il n’a été prévu "ni rencontre ni dîner" jeudi soir entre les deux hommes. Qui devront pourtant reprendre langue rapidement pour valider le casting gouvernemental et boucler un budget 2025 à hauts risques. Et inventer une relation inédite, non pas de cohabitation mais de "coexistence exigeante", selon l’entourage du président.
Dès vendredi, il a reçu à 09H00 son prédécesseur Gabriel Attal, président du groupe macroniste Ensemble pour la République (EPR) à l’Assemblée, puis à 10H15 les dirigeants de son propre parti, Les Républicains (LR), pour examiner les conditions d’une participation à sa future équipe. A l'issue de cette rencontre, Les Républicains ont annoncé conditionner leur participation au gouvernement au programme de Michel Barnier.
"Certaines personnalités de gauche" ont également été contactées et d’autres échanges devaient suivre, y compris avec la France insoumise et le Rassemblement national, car "il veut rassembler et respecter tout le monde".
Le nouveau Premier ministre a lui-même tendu des perches dès sa première prise de parole : "Il faudra beaucoup d’écoute" et "du respect à l’égard de toutes les forces politiques qui sont représentées" au Parlement. Car de son point de vue "le sectarisme est une preuve de faiblesse, quand on est sectaire c’est qu’on n’est pas sûr de ses idées".
Ses priorités restent encore à préciser. Tout juste a-t-il assuré que "l’école restera la priorité du gouvernement", de même que d’autres chantiers dont "l’accès aux services publics", "la sécurité au quotidien", "la maîtrise de l’immigration", ou encore le travail et le pouvoir d’achat.
Une feuille de route a priori consensuelle, même si Michel Barnier a promis "des changements et des ruptures" et laissé augurer de choix difficiles avec la volonté affichée de "dire la vérité" sur "la dette financière et écologique".
Reste à voir qui acceptera de monter à bord. Pas le RN, qui "ne participera pas" au gouvernement Barnier mais a "posé des conditions", a fait savoir Marine Le Pen, dont les 126 députés détiennent la clé d’une éventuelle censure.
Pas la gauche non plus, qui de Jean-Luc Mélenchon à Carole Delga a immédiatement fustigé ce "Premier ministre nommé avec la permission du RN" et de facto "dans les mains des groupes parlementaires d’extrême droite". Ce qui conforte LFI dans sa démarche de destitution engagée contre Emmanuel Macron, doublée d’appels à manifester dans plusieurs villes samedi.
Restent donc les membres de l’ex-majorité, qui seront "nombreux à aider" le nouveau Premier ministre, selon l’un de ses prédécesseurs Edouard Philippe. Pas vraiment idéal toutefois pour incarner les "ruptures" annoncées. Michel Barnier, toujours membre des Républicains (LR), peut également compter sur sa famille politique. "C’est quelqu’un de chez nous, on va pouvoir engager le dialogue facilement avec lui", se réjouit la secrétaire générale du parti de droite, Annie Genevard.
Les députés du groupe centriste Liot (Libertés, Indépendants, Outre-mer, Territoires) font aussi montre de bonnes dispositions à l’égard de ce "politique avec une expérience forte" qui "correspond en partie au profil" qu’ils souhaitaient, sous réserve que "la composition du futur gouvernement et (ses) orientations marquent un changement de méthodes et de cap".