"Gloria montait à l'avant dès un an, et (sa petite soeur) Simone la suivra dès qu’elle se tiendra assise", témoigne Jean-Rémi Houel, 37 ans, de Pantin (Seine-Saint-Denis).
"Il faut un vélo un peu plus costaud, qui tient la route, avec un bon freinage. Et l’aide électrique, dans les côtes ou pour s’extirper des endroits où il n’y pas de piste cyclable", explique le cycliste, qui a testé plusieurs modèles.
Il s'agit aussi de faire "encore plus attention" quand on roule. Les automobilistes, eux, respectent davantage les distances de sécurité et "essaient moins de forcer", mais seulement s'ils voient l'enfant sur le vélo, note M. Houel.
"Le développement de la filière du vélo, avec la création de nouveaux vélos-cargos pensés pour les parents, a permis de nouvelles pratiques, notamment dans les grandes villes où il y a des pistes cyclables", explique Catherine Pilon, secrétaire générale du Club des villes et territoires cyclables et marchables.
"Longtails"
Si les parents équipent leur vélo d'un siège depuis longtemps, les "longtails", des modèles dotés de cadres plus longs et solides, permettent maintenant d'emmener un ou plusieurs enfants, puis d'aller au travail, avec l'aide du moteur électrique.
Le siège adapté est obligatoire jusqu’à cinq ans, et le casque jusqu'à douze.
Tern, Trek, Moustache... "Toutes les marques, petites ou grandes, ont intégré des longtails à leur gamme", note Denis Briscadieu du groupe Cyclelab (magasins Culture Vélo).
Misato et Isao Moutte testent des cargos pour transporter leurs deux enfants (Kanta et Yukari, 9 et 6 ans) autour de Montreuil (Seine-Saint-Denis), où ils habitent. Ils ont l'habitude de se déplacer sur des vélos classiques avec chacun un enfant, comme au Japon où ils ont grandi, et parfois "le grand fait du vélo en même temps, mais ce n'est pas forcément rassurant", explique le père, Isao.
Le couple remarque que les prix de ces vélos restent élevés, autour de 5.000 euros, mais de nombreuses aides à l'achat viennent adoucir la note. Et les deux grands distributeurs d'articles de sport, Decathlon et Intersport, ont dégainé leur propre modèle de "longtail", avec un prix plus compétitif, à 2.999 euros.
"C'est sécurité, stabilité avant tout", commente David Jungels, de la chaîne de vélocistes Ecox. "En région parisienne, il y a eu une forte augmentation des pistes cyclables. Ça rassure monsieur et madame-tout-le-monde, qui n'étaient pas forcément cyclistes".
Les rues devant les écoles étaient notamment "le lieu de tous les dangers" mais de plus en plus de mairies les rendent piétonnes, salue Mme Pilon. Et si "les enfants restent passifs" derrière leurs parents, "ça les habitue au vélo, ça leur donne une autre vision de la ville, et une autre éducation à la route qu’en voiture".
Mobylette
33.000 vélos-cargos électriques (une catégorie qui comprend aussi des vélos plus longs pour le transport de marchandises) ont été vendus l'année dernière en France, dont un tiers fabriqués dans l'Hexagone. Cela reste une fraction du nombre total de vélos vendus dans le pays - 2,2 millions en 2023.
"Il y a une accélération du longtail aux dépens des biporteurs et triporteurs. C’est un produit simple à prendre en main, qui permet de se faufiler un peu partout", souligne Amélie Guicheney, 38 ans, cofondatrice de la marque Gaya.
Les modèles de la marque (5.000 ventes en deux ans) sont inspirés des mobylettes, avec un barycentre très bas et de gros pneus. Ils sont achetés par "des familles qui veulent emmener un ou deux enfants", mais aussi des courses, explique Amélie Guicheney. Le vélo remplace les transports en communs, ou la voiture en zone périurbaine.
Gaya constate aussi un report des utilisateurs de scooter, qui veulent continuer à transporter un adulte ou un grand enfant. Pour éviter les vols de ces vélos qui restent parfois garés dans la rue, ils sont géolocalisés et leur assistance électrique peut être déconnectée à distance.