Si je voulais, je pourrais chaque jour écrire un billet sur la situation politique singulière qui est en train d’endormir ou d’énerver les Français.
Commence à monter, contre Emmanuel Macron, le reproche de n’avoir pas purgé d’emblée l’option du gouvernement NFP avec Lucie Castets comme Première ministre. La censure serait tombée au bout de 24 heures et on n’en parlerait plus ! Pourtant je continue à penser que la méthode choisie par le président et ses critères n’étaient pas aberrants, et je pourrais répéter ce que je disais fin juillet avant les Jeux olympiques: « Il n’y a pas de médaille d’or pour la vitesse politique » ! Je concède cependant que la critique de François Bayrou le blâmant pour avoir discuté avec les partis[1] alors qu’il s’agissait de sa seule responsabilité peut être entendue.
Après ce préambule on voudra bien me pardonner de quitter le champ de cette actualité sans cesse brûlante au profit d’une analyse médiatique que le hasard de la rentrée me permet de proposer. En effet, revenu à Paris, j’ai pu prendre connaissance de plusieurs numéros de Valeurs actuelles, dont celui du 25 au 31 juillet consacré en particulier au thème de « La télé qui rend fou ».
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Après un excellent article d’Édouard Lavollé dénonçant quelques personnalités médiatiques ignorant le pluralisme et diffusant un catéchisme progressiste jamais questionné – la suffisance d’un Yann Barthès aurait mérité d’être mise en exergue -, ce que l’hebdomadaire qualifie de « panthéon des exaspérants » est passé au crible sur un mode plus ou moins talentueux : Gilles-William Goldnadel s’est chargé de Patrick Cohen, Charles Consigny de Pablo Pillaud-Vivien, Frank Tapiro de Karim Zéribi, Geoffroy Lejeune de Jean-Michel Aphatie et, enfin, Eric Naulleau de Gilles Verdez.
Je connais les « procureurs » et plus ou moins leurs « victimes ». Rien de ce que j’ai lu n’est choquant, outrancier, encore moins insultant – j’aurais même été tenté, pour tel ou tel, d’être plus acerbe – et pourtant je n’ai pu dissimuler un malaise intellectuel face à cet exercice collectif. Celui-ci m’est apparu injuste dans sa sélection. Quoi qu’on pense de Patrick Cohen et des contradictions que sa pratique professionnelle souvent orientée peut susciter, je ne l’aurais pas mis sur le même plan que les autres. Certes, comme Jean-Michel Aphatie, on l’a connu adepte d’une discrimination : ne devaient être invités dans les émissions que ceux qu’il estimait décents et convenables. Selon ses seuls critères. Mais il n’empêche que c’est aller trop loin que de le traiter « d’exaspérant ».
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Cette rectification opérée, quelque chose d’autre, de plus fondamental, m’aurait détourné du bonheur apparent de pouvoir m’exprimer en toute liberté sur des personnalités que professionnellement je côtoyais. Non pas la peur ou la timidité, non pas non plus le risque de dégrader encore davantage des relations déjà fragilisées.
Mais seulement la conscience que m’autorisant dans mon registre une totale liberté, il convenait que j’acceptasse la rançon de celle-ci : l’infinie diversité, pour le pire ou le meilleur, de mes partenaires médiatiques. Qu’on le veuille ou non, il y avait, dans ces cinq jugements, au moins l’envie de démontrer une supériorité, la certitude implicite que les uns étaient meilleurs que les autres. Pour être sans doute vraie, cette perception éclairant chacune des analyses, ne devait cependant pas les priver de cette modestie élémentaire car leurs cibles auraient pu tout aussi bien dresser d’eux un portrait négatif – ou au moins contrasté.
Je suis d’autant plus sensible à ce risque de réciprocité que, aussi susceptible que je puisse être, j’ai toujours compris que les critiques que je formulais reviendraient peut-être à mon encontre comme un boomerang. Et que j’aurais à les accepter.
Dans la vie intellectuelle et médiatique, il me semble que nous n’avons pas le choix. Les idées sont faites pour être discutées, contredites ou approuvées. Avec l’élémentaire courtoisie de bien écouter l’autre avant. Certes on peut être plus qu’agacé par la manière dont certains conçoivent le débat, le simplifient à l’extrême ou le fuient. Mais il faut tenir et ne pas chercher d’autre remède que sa propre parole en réplique. J’essaie de m’imaginer face à la mission d’écrire tout le mal que je pense de certains. Passée l’exaltation du droit à une sincérité sans nuance, je suis sûr que je n’échapperais pas, dans les rapports humains, à cette interrogation fondamentale sur la paille et la poutre. Dans quel œil la première, dans quel œil la seconde ?
Les chaises musicales de la télé Qui dit rentrée télé dit jeu des chaises musicales pour nos journalistes et animateurs vedettes… Voici les mouvements notables de cette année : – Julien Arnaud quitte TF1 pour animer « Télématin » sur France 2, à la place de Thomas Sotto. Flavie Flamand co-animera l’émission matinale. – Thomas Sotto, critiqué par son équipe de « Télématin » la saison dernière, animera lui la matinale de RTL – Patrick Cohen est de retour à France Inter où il proposera un édito politique chaque matin à 7h40 – Sur la même antenne, le très woke Matthieu Noël voit son émission prolongée d’une heure. L’émission animée l’année dernière par Marie Misset, Marine Baousson et Maïa Mazaurette en remplacement de la bande de Charline Vanhoenacker n’a jamais trouvé son public. – Malgré la polémique monstre déclenchée par Guillaume Meurice dans son émission satirique l’année dernière, concernant une blague sur le prépuce du Premier ministre israélien, Charline Vanhoenacker retrouve une chronique quotidienne sur l’antenne publique, chaque matin, à 9h45. – Guillaume Meurice reconstitue l’équipe déchue de Melle Vanhoenacker sur Radio Nova, le dimanche soir. – Benjamin Castaldi est chargé de relancer la matinale d’Europe 2. – L’éditorialiste du Figaro Yves Thréard arrive sur BFMTV le vendredi soir (« Tous contre Thréard! ») … • La rédaction |
[1] https://www.francetvinfo.fr/politique/nouveau-gouvernement-le-president-est-dans-son-role-affirme-francois-bayrou-president-du-modem_6746257.html
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