Récemment, les membres d'une bande criminelle ont forcé une famille à quitter la maison qu'elle louait à Mirador de Oriente, un quartier populaire de la capitale Tegucigalpa.
Les propriétaires l'ont alors relouée à un jeune couple, mais le jour de leur emménagement il a été séquestré en même temps que trois amis venus l'aider. Leurs corps ont été retrouvés une semaine plus tard non loin.
Six suspects ont été arrêtés pour ce crime, attribué au redouté Barrio 18.
Comme dans d'autres pays d'Amérique latine, dont l'Equateur notamment, les gangs forcent les familles à quitter leur maison afin de les utiliser pour leurs activités criminelles.
Les gangs et les narcotrafiquants maintiennent "un mini-gouvernement" dans les zones qu'ils contrôlent, selon le bureau du Commissaire national aux droits humains (Ombudsman).
En 2023, ce dernier a reçu 1.761 plaintes pour déplacement forcé. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) en a recensé 247.000 entre 2004 et 2018.
Les personnes fuient à cause de "menaces, du racket, du meurtre d'un membre de la famille, de la spoliation de biens et de propriétés et du recrutement d'enfants", explique Elsy Reyes, responsable de la mobilité humaine au bureau du HCR.
"Ils leur donnent même des délais de 24 heures pour qu'ils puissent partir", explique la responsable à l'AFP, ajoutant que le cadastre a comptabilisé en 2018 50.000 "maisons abandonnées" dans le pays.
Les gangs et les narcotrafiquants ont fait du Honduras l'un des pays n'étant pas en situation de guerre les plus violents au monde.
Le taux d'homicide y était de 34 pour 100.000 habitants en 2023, soit près de six fois la moyenne mondiale. Toutefois, ce chiffre est en baisse, puisqu'en 2013, il était de 79 pour 100.000 habitants.
Fuir le pays
Outre les personnes déplacées à l'intérieur du pays, des milliers de Honduriens partent se réfugier à l'étranger.
"C'est une augmentation progressive, chaque année", assure Kathryn Lo, représentante du HCR au Honduras.
Selon les chiffres de l'agence onusienne, en 2014, il y avait plus de 14.000 Honduriens "réfugiés ou demandeurs d'asile" à l'étranger. En 2023, ce chiffre a dépassé les 300.000, la plupart ayant quitté le pays pour les États-Unis ou le Mexique.
Les personnes déplacées à l'intérieur du pays et celles qui cherchent refuge à l'étranger totalisent "plus d'un demi-million, sur une population de 10 millions" d'habitants, soit "5% de la population", précise Mme Lo.
Selon elle, l'approbation en 2023 d'une "loi sur la prévention, la protection et la prise en charge des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays" constitue une étape positive.
Pour lutter contre les gangs, les autorités ont imposé l'état d'urgence en décembre 2022, autorisant les arrestations sans mandat.
En vertu de cette mesure, le gouvernement de gauche de la présidente Xiomara Castro a déployé des milliers de policiers et de militaires dans tout le pays.
Le ministre de la Sécurité, Gustavo Sanchez, a affirmé que 12.000 armes avaient été saisies et 4.500 membres de gangs ou de cartels de la drogue arrêtés.
Mais les raids de la police sont aussi à l'origine de déplacements forcés, estime le bureau du médiateur.
"L'état d'urgence a eu un impact important sur les déplacements forcés. Nous avons identifié des cas où, en raison des perquisitions constantes de la police nationale, les gens sont contraints de quitter leur domicile", souligne Elsy Reyes.