C’est une nouvelle crise politique, dans un pays déjà en proie à l’instabilité. Alors que le président Nicolas Maduro a été officiellement réélu à la tête du Venezuela lundi 28 juillet, l’opposition a également revendiqué la victoire et refusé les résultats proclamés par le Conseil national électoral (CNE), entachés selon elle par de nombreuses irrégularités. Depuis, les rues s’embrasent, faisant même un mort dans l’Etat de Yaracuy, au nord-ouest du pays. L’Express fait le point sur la situation.
Il est au pouvoir depuis 11 ans, mais Nicolas Maduro semble indéboulonnable. Le dimanche 28 juillet, alors qu’il est un peu plus de minuit, le président du Conseil national électoral et militant chaviste, Elvis Amoroso, l’affirme : avec 5,15 millions de voix (51,2 %), Nicolas Maduro est réélu pour un troisième mandat, et la tendance est "irréversible". Son opposant, Edmundo Gonzalez Urrutia, n’aurait obtenu "que" 4,45 millions, soit 44 % des suffrages. Pourtant, le bilan économique de l’héritier d’Hugo Chaves est loin d’être mirifique : le PIB du pays, longtemps considéré comme l’un des plus riches d’Amérique latine, s’est effondré de 80 %, rapportent Les Echos. Au point que plus de 7,7 millions de personnes ont quitté le pays depuis 2015, soit plus d’un Vénézuélien sur quatre, selon les estimations de l'ONU.
"Le Venezuela a un nouveau président élu et c’est Edmundo Gonzalez". Le soir même de l’élection, Maria Corina Machado, la dirigeante de l’opposition, a contesté les résultats du scrutin, estimant que ce dernier a été vicié. En cause : l’absence de publication des décomptes par bureaux de vote, ou des intimidations de citoyens dans certains bureaux de vote, rapportées par la presse locale. Selon l’opposition, le résultat est d’autant plus contestable que tous les sondages donnaient Edmundo Gonzalez Urrutia largement vainqueur, avec 65 % des suffrages.
La communauté internationale, elle, est aussi circonspecte. Alors que l’Argentine, le Costa Rica, l’Equateur, le Guatemala, le Panama, le Paraguay, le Pérou, la République dominicaine et l’Uruguay ont exigé "un réexamen complet des résultats avec la présence d’observateurs électoraux indépendants" et une réunion sous l’égide de l’Organisation des Etats américains, les Etats-Unis ont eux affirmé "craindre que le résultat annoncé ne reflète pas la volonté ou le vote du peuple vénézuélien". A rebours de ces pays, le président mexicain Andrés Manuel Lopez Obrador a déclaré que son gouvernement reconnaîtra le résultat final proclamé par l’autorité électorale.
Lundi, Elvis Amoroso a dénoncé une attaque brutale contre le système informatisé de vote pour expliquer le retard des résultats. Le parquet du pays a ouvert une enquête, évoquant l’implication de Maria Corina Machado dans ce "piratage". De son côté, la cheffe de l’opposition a affirmé que des "preuves de la victoire" ont été fournies à "des dirigeants" dans le monde et qu’elles seraient mises en ligne pour tout un chacun prochainement.
Des affiches du président brûlées, des jets de gaz lacrymogène… Depuis lundi, les rues de Caracas s’embrasent. "Qu’il rende le pouvoir maintenant", ont lancé des milliers de manifestants dans plusieurs quartiers pauvres de la capitale, tandis que d’autres manifestants chantaient "Je ne veux pas de primes, je ne veux pas de CLAP, je veux que Maduro s’en aille", faisant allusion aux aides instaurées pour les bas salaires et aux aides alimentaires (CLAP) distribuées par le gouvernement.
Ailleurs dans le pays, la contestation a viré au drame. "Au moins une personne a été tuée dans (l’Etat de) Yaracuy (nord-ouest) et 46 personnes sont détenues", a écrit sur X Alfredo Romero, directeur de l’ONG Foro Penal, spécialisée dans la défense des prisonniers politiques. Deux statues d’Hugo Chavez, président du Venezuela de 1999 jusqu’à sa mort en 2013, ont par ailleurs été déboulonnées à La Guaira (plage de Caracas) et à Mariara (nord) par des manifestants, a annoncé à la télévision son héritier désigné Nicolas Maduro.