Colossale ! À moins de trois mètres d’une éléphante de quatre tonnes et demie, on ne peut que se sentir petit.
Dans son bâtiment dédié, au PAL, loin de l’agitation du public, Mégane et Céline bichonnent Accra, comme tous les jours. Pendant que l’une des soigneuses donne des consignes à la matriarche des éléphants du parc, à l’aide d’un seau de pommes et d’autres gourmandises, l’autre contrôle la santé de ses orteils.
Renforcer le lien animal-soigneur« On renforce au quotidien le lien de confiance entre l’animal et le soigneur. Ce travail interactif est primordial, car en cas de besoin médical, nous devons pouvoir intervenir en toute sécurité », explique Nicolas Géli, responsable zoologique du PAL. Une prise de sang demande d’avoir accès à l’arrière de l’oreille de la bête… il vaut mieux qu’elle reste calme !Pour la sécurité, attention à ne pas dépasser la ligne jaune.
Aujourd’hui, comme d’habitude, elle est paisible et joueuse, s’aspergeant de sable avec sa trompe. De l’autre côté de la grille, on n’entend pas un bruit. Pourtant, ce mercredi matin, il y a un peu de monde : une vingtaine d’enfants de l’Académie du PAL assiste aux soins, bouches bées devant l’impressionnante éléphante âgée de 32 ans. Eux ont entre 8 et 14 ans et viennent toutes les semaines participer à des activités en lien avec la biodiversité dans le parc de Saint-Pourçain-sur-Besbre, pendant le temps extrascolaire. Eh oui, les coulisses ne sont réservées qu’aux soigneurs.Avant de rentrer dans le bâtiment aux éléphants, on trempe ses pieds dans le pédiluve : pas question de leur transmettre des pathologies.
« Notre mission de sensibilisation participe à notre succès »Le PAL tient à ouvrir l’envers du décor au public, entre les ateliers nourrissage et les activités « soigneurs d’un jour ». Une façon pour le parc de sensibiliser les visiteurs au bien-être animal, aux problématiques environnementales et aux menaces d’extinction de certaines espèces.
« C’est la mission que le PAL se donne et qui participe certainement à son succès », précise le responsable zoologique du parc, qui accueille 700.000 visiteurs tous les ans.
Ici, les animaux sont traités comme les vedettes qu’ils sont. En coulisses, comme sous les projecteurs. Chaque visiteur peut s’en rendre compte : les animaux sont les seuls à décider quand ils entrent en scène. Parfois, ils se cachent. Parfois, ils s’éloignent des points d’observation. Souvent les éléphants flânent, au loin, dans la zone forestière de leur parc d’un hectare et demi. D’autres fois, ils assurent le show en se roulant dans la boue de leur mare. On est ici chez eux, leur épanouissement est la priorité du parc.
En captivité, la difficulté est de divertir les animaux. S’ils sont malheureux, ils adoptent des comportements « stéréotypés », comme marcher en rond ou secouer la tête durant des heures. Pour éloigner cette perspective peu réjouissante, les soigneurs installent des agrès, des jeux dans leurs terrains et leurs loges individuelles.
Aussi, ils varient au maximum le type de nourriture lorsque c’est possible, ainsi que les heures des repas, ou encore les points de nourrissage, afin de les stimuler. Pour ne pas tomber dans la routine, rien de tel que les autres animaux pour les divertir. « Ils adorent se distraire en observant les comportements d’autres espèces ! Pour les éléphants en l’occurrence, on réfléchit en ce moment à les faire cohabiter, en extérieur, avec des antilopes », annonce Nicolas Géli.Accra s'amuse avec le sable.
En intérieur, les loges individuelles, en libre accès la nuit, font figure de modèle pour les autres zoos. « Nous recevons régulièrement des représentants d’autres parcs zoologiques, qui viennent s’en inspirer. Par exemple, l’isolation du très haut bâtiment des trois girafes, conçu il y a trois ans, permet de maintenir une température à plus de 15 degrés toute l’année. Idéal pour ces animaux africains qui ont du mal avec le climat d’hiver européen.
Girafon, tigreau, éléphanteau à venir !Et en parlant de girafes, un petit girafon devrait pointer le bout de son museau dans moins de deux ans. Un jeune mâle, introduit il y a trois ans, arrive à maturité sexuelle et a déjà des « comportements suspects ». Une tigresse est aussi « potentiellement gestante », tout comme Nina, une éléphante.
Mais là encore, le bien-être animal prime. S’il y a des reproductions dans le parc, c’est uniquement dans le cadre d’une coopération européenne de stratégie de conservations des espèces. Nicolas Géli tient à souligner, « avoir un bébé, c’est un argument marketing, sur lequel nous ne comptons pas jouer... » Contrairement à d’autres parcs en France.
« Tout pour sauver Nina », en 2015En 2015, l’éléphante Nina, alors âgée de 23 ans, est blessée par un jeune mâle maladroit qui tentait de s’accoupler avec elle. Elle souffre alors d’une double fracture du tibia péroné. En pareil cas, « un animal de cette taille est condamné, il doit être euthanasié ». Mais l’équipe du PAL décide de tout faire pour la sauver, avec l’appui d’Arnaud Bennet, le PDG du parc. Au terme de deux ans de soins par des spécialistes français et allemands, d’attelles fabriquées sur mesure, de « frais conséquents engagés », Nina a pu marcher à nouveau. Elle a même donné naissance à Jack, en 2021. « On attend prochainement la confirmation d’une nouvelle gestation pour elle », annonce Nicolas Géli, qui précise que « cette fois, le mâle qui l’a fécondée était plus expérimenté et attentionné ! »
Texte Emeric EnaudPhotos Corentin Garault