Entendre l’instrument souffler sa première note est comme une naissance. Après des mois de gestation, d’assemblage et de construction, l’accordéon peut enfin être serré dans les bras de son acquéreur, sentir la chaleur de ses mains. Une complicité s’instaure. Ils vont grandir et vieillir ensemble. Écrire leur partition.
Ses instruments s'exportentLes accordéons nécessitent un minimum de 120 heures de travail.Ce lien si particulier qui unit l’instrument à son musicien, Tania Rutkowski le connaît. D’abord puisqu’elle joue, mais aussi et surtout parce qu’elle conçoit des accordéons diatoniques et chromatiques depuis 20 ans. De son atelier, Valses à plein temps, situé à Toiras, commune du Vernet-Chaméane, sont sortis plus de 200 exemplaires, réalisés sur mesure, "et qui tournent en France et ailleurs dans le monde", sourit la factrice. Ce jour-là, elle donne la dernière touche à un modèle équipé d’un système de sonorisation. Autrement dit, "l’accordéon se branche sur un ampli".
Accordage, finition et petits réglages vont occuper la créatrice encore plusieurs jours.
"Ça dépend des modèles, mais en règle générale, il faut 120 heures pour concevoir un accordéon et j’en réalise dix à douze chaque année (*)."
Deux ans d'attenteLes éléments de ces instruments sur mesure sont importés d'Italie.Entre la commande et la réception s’écoulent 24 mois. Il faut donc s’armer de patience. C’est le prix à payer pour un objet unique, réalisé entièrement à la main et siglé TR Accordéons. Ici, le client, domicilié dans les Alpes-de-Haute-Provence, « s’est fait plaisir avec cet instrument qu’il va garder longtemps », poursuit-elle. Son modèle le plus prisé est l’accordéon diatonique. Indissociable de la musique trad, cet instrument accompagne musiciens et danseurs depuis des lustres. "Je réalise 90 % de diatoniques", assure Tania Rutkowski. Quelques chromatiques sortent toutefois de l’atelier puydômois.
Acheté il y a 14 ansTiennet Simonnin, musicien professionnel basé en Bretagne, a acheté le sien il y a 14 ans. Il explique ce qui a guidé son choix. Tania Rutkowski partage son atelier avec Chloé Malnoury qui réalise des lunettes en bois.
« Je recherchais un accordéon pour jouer de la musique irlandaise. Celui de Tania est expressif, le “toucher” est souple et homogène sur toutes les rangées. Avec le temps, le clavier s’est encore assoupli. Et, ce qui est le plus remarquable, ce sont les anches d’excellentes qualités qui évitent de l’accorder trop souvent
L’aisance technique et la qualité de fabrication ne sont pas les seuls arguments favorables à son savoir-faire. Les clients viennent aussi chercher un son et une esthétique. Si les goûts et les couleurs ont évolué au fil des ans, le son « tout en rondeur accompagné de basses profondes », fait encore et toujours la notoriété de Tania. Sa signature.
(*) Ses accordéons sont vendus entre 2.000 et 5.000 €.Pratique. Atelier Valses à plein temps, lieu-dit Toiras, le Vernet-Chaméane. Tèl : 04.73.89.68.14. Site web : tr-accordeons.com.
David Allignon
