Il y a quelque chose qui tient du déni dans ce qui se déroule en accéléré sous nos yeux. Qu’il s’agisse de l’effarement des uns comme de l’avidité prématurée des autres, grisés par cette opportunité inespérée, offerte un soir de juin.
Peut-être savions-nous tous que la peur et la rage accumulées jettent toujours dans les bras du plus offrant, en dépit des mensonges et des incohérences… Et que dans l’espoir de reprendre prise sur son destin, l’inconnu, celui qui garde le bénéfice du doute, est devenu plus séduisant que l’impuissance politique.
Sud-Ouest, Massif central, Savoie, Bretagne... Quels sont ces territoires qui résistent au Rassemblement national ?
La « grenade dégoupillée » par Emmanuel Macron n’a eu, pour effet, au fond, que de porter une lumière crue sur la société française, celle que nul ne sait encore réparer.
À force d’exalter à outrance les différences, on ne fait plus communauté, au point de croire que le malheur de cet autre pourra soigner le nôtre. Voici venue l’ère du soupçon, celle du « je ne suis pas raciste mais… ».
Il n’y a aucun espoir de vivre mieux quand le moteur est celui du ressentiment car il est infini. Il se peut que l’extrême droite ne parvienne pas à obtenir, dimanche, une majorité absolue, mais chacun sait, en réalité, qu’une grande partie de la société a basculé, que l’amerture succédera. Et qu’il en faudra de l’intelligence et du courage pour reconstruire patiemment ce dont nous n’avons pas su prendre soin.
Florence Chédotal