À l’heure où certain·es politiques, selon une logique qui leur appartient, rechignent à clairement appeler à voter contre le RN, où des électeur·trices seraient par pure frivolité tenté·es de partir en vacances sans faire de procuration, voire s’apprêtent à donner carrément leur voix à un·e candidat·e d’extrême droite parce qu’après tout pourquoi ne pas essayer, il est bon de relire Matin brun, bref texte tranchant qui remet, dirait-on, les pendules à l’heure.
Dans un pays situé ni dans l’espace ni dans le temps, le parti au pouvoir décide d’interdire par décret les chiens non bruns. Le narrateur n’y voit pas d’inconvénient, de toute façon il n’est pas concerné, alors il ne voit pas pourquoi il s’en inquiéterait.
Mais, petit à petit, les autorités vont se mettre à traquer non seulement les citoyen·nes qui n’auraient pas renoncé à leur animal de compagnie, mais aussi celles et ceux qui, dans le passé, avant la divulgation du décret, auraient possédé un chien non brun. Et puis voilà qu’on s’attaque à leur famille, à leurs amis. Et c’est bien trop tard que le narrateur se dit qu’il aurait été bon de s’opposer, dès le départ, à ce décret liberticide.
Signé en 1998 par Franck Pavloff, auteur de romans noirs et de littérature jeunesse, ce texte qui fait référence au fascisme et aux chemises brunes est rapidement devenu culte, particulièrement en 2002, quand Jean-Marie Le Pen s’est retrouvé au second tour de l’élection présidentielle. Il est malheureusement toujours d’actualité.
Matin brun de Franck Pavloff (Cheyne hors collection), 10 pages, 2 €.