Chez Audebert Boissons, à Lempdes (Puy-de-Dôme), on prépare activement l’été tout en gardant un œil sur l’hiver. Dans une partie des vastes locaux que l’entreprise occupe depuis octobre 2019, juste derrière le bâtiment principal qui abrite les installations d’embouteillage, de brasserie et de torréfaction, se monte un drôle de mikado en bois, une installation unique en son genre par sa taille, œuvre de la société charentaise Kallafut, qui permettra d’installer et gérer quelque 1.750 fûts. De quoi accueillir l’un des futurs produits phares de l’entreprise : le whisky maison, dont les premières bouteilles doivent sortir en fin d’année.
Un nouveau chapitre pour la maison Audebert, née en Corrèze, précisément à Bort-les-Orgues, en 1901, puis devenue numéro un auvergnat de son secteur, avec une solide implantation puydômoise, que symbolise le nouveau siège de Lempdes (15 M€ d’investissement), ainsi que deux antennes à Aurillac et Saint-Étienne, les installations corréziennes ayant cessé de fonctionner.Philippe Audebert avec son chef de production, Michaël Inverardi, au sein de l’installation qui accueillera les fûts. Photo Frédéric Marquet
Le poids de l'été diffère selon les lieuxTrois pôles, donc, désormais, et une saison estivale qui pèse très lourd. Même si le poids diffère un peu selon les lieux, ainsi que le détaille le patron, Philippe Audebert, en consultant sur son ordinateur ses registres de comptes : « Sur six mois, d’avril à octobre, nous réalisons deux tiers de notre chiffre d’affaires de l’année. Mais ce n’est pas linéaire. Sur le Cantal, les huit semaines de juillet et août représentent 30 % du chiffre annuel et août le double de septembre, alors qu’à Saint-Étienne, août est le mois le plus faible. Et sur Clermont, où peu d’établissements ferment en été, l’activité d’été est très forte. »
Le pari de la bière sans alcoolLe chiffre d’affaires annuel global, pour 2023, s’était établi à 22,5 M€, contre 19,8 M€ l’année précédente. D’où le sentiment du dirigeant que la parenthèse Covid s’est bien refermée. Pour rebondir, Audebert Boissons a encore misé sur ses propres marques et recettes nouvelles. Il en compte une quinzaine à ce jour, dont certaines éphémères, qui génèrent un tiers des recettes.
L’an dernier, c’est le pari de la bière sans alcool que l’entreprise a relevé, avec sa Bougnat 0 %. « Ce ne sont pas encore des gros volumes, mais il y a un marché avec des chiffres qui augmentent chaque année, souligne le directeur de production, Michaël Inverardi, qui élabore les recettes. L’idée était de se rapprocher vraiment du goût de la bière traditionnelle, pour que ceux qui en consomment ne se sentent pas exclus. »
Des stocks de sécurité constitués dès févrierPari tenu, estime Philippe Audebert, qui songe à augmenter la production. « Nous avons brassé 60 hectolitres, comme l’an dernier où nous avons fini en rupture. Nous l’avons aussi proposée en fût et un bar clermontois en a passé plusieurs. Il a osé et ça a fonctionné. Nous l’avons aussi installé en grande distribution. Pour l’instant, cela ne représente qu’1 % de nos ventes, mais ça progresse. Nous brasserons peut-être bientôt deux fois dans l’année de la bière sans alcool. »
Ce cap estival primordial, l’entreprise y songe depuis février. « C’est à ce moment-là que nous faisons des stocks de sécurité pour notre métier de distributeur. On parle d’une dizaine de semi-remorques. En 2022 et 2023, ces stocks nous ont permis de ne jamais être en rupture sur les marques nationales et internationales. »
Préparation au cœur de l’hiverQuant aux fabrications maisons, elles se préparent aussi à partir de l’hiver, mais avec une contrainte, rappelle le patron. « Un soda est facile à fabriquer, mais on ne peut pas le faire plus de six mois à l’avance et nous travaillons avec des emballages consignés pour les bars. Nous sommes limités par notre stock d’emballages, sachant qu’une bouteille fait une cinquantaine de rotations. Et pour les fûts inox, c’est trois ou quatre rotations, pas plus. Nous avons un parc pour nos bières et limonades de 15.000 fûts, de 30 et 20 litres. Un stock constitué depuis 2010. » À environ 80 euros le fût, cela donne une idée de l’investissement.
Qui dit été dit météo, laquelle joue aussi fortement sur les ventes. Philippe Audebert l’a mesuré : « Les ventes de bière augmentent surtout en juin et juillet. Cette année, c’est un peu la “cata” pour l’instant avec la pluie. En 2022, année exceptionnellement chaude, le beau temps nous avait fait gagner 5 % de ventes. Cette année, si ça ne s’améliore pas, ce sera plutôt -4 à -5 %, ce qui donne entre les deux presque 10 % d’écart. »
D'autres débouchésIl faut donc trouver d’autres débouchés moins aléatoires. Audebert Boissons compte trois magasins de vente directe, à Lempdes, Clermont et Aurillac, qui génèrent près de 5 % des ventes. Une vitrine à ne pas négliger, donc, et qui progresse. Et pour les années à venir, Philippe Audebert mise sur les grandes et moyennes surfaces. « Nous avons un chef des ventes pour ce secteur et deux alternants depuis un an. Nous touchons aujourd’hui près de 200 magasins. Si ça continue à progresser, nous les embaucherons en CDI. » L’effectif actuel de 80 salariés pourrait donc s’étoffer. D’autant, qu’outre le whisky, Audebert concocte d’autres nouveautés qu’il dévoilera bientôt.
Patrice Campo
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