Hier, les débats de la deuxième journée se sont éloignés de l’accusé pour s’intéresser au rôle nébuleux du locataire de l’appartement de Coubon chez qui la victime a perdu la vie.
Eddy Cointrel, 40 ans, encourt 30 ans de réclusion criminelle pour avoir commis des violences volontaires ayant entraîné la mort sans l’intention de la donner. Dans la nuit du 16 au 17 février 2021 ses coups avaient entraîné la mort d’Éric Guerdner, 46 ans. La victime est-elle morte à cause d’un coup de colère d’un seul homme ou était-elle devenue le souffre-douleur du locataire de l’appartement où elle a perdu la vie ? La question était au centre des débats de la deuxième journée des assises, hier.
Qui est ce vagabond accusé d’avoir tué son ami à Coubon ?
Les enfants d’Éric Guerdner sont venus parler de leur père à la barre du tribunal. « Il nous disait tout le temps qu’il nous aimait, qu’il était fier de nous. » « On a vécu une vie de misère et notre seul lien d’amour c’était lui. » « Il y avait l’alcool, sa maladie. » « Il était incapable de se défendre, même face à un enfant de 15 ans. » « Vous ne pouvez pas savoir comme on s’en veut de ne pas être allé dans cet appartement à Coubon. » Cela faisait une semaine que la fratrie de cinq enfants avait des doutes. « Quand on téléphonait, c’était lui (le locataire de l’appartement NDLR) qui répondait. Il disait que notre père était parti à Valence, mais c’était faux. » L’homme chez qui était leur père « depuis une semaine, pas plus » ils ne le connaissent que trop bien. Il s’agit de leur ancien beau-père « alcoolique et violent » avec qui ils ont vécu une dizaine d’années sur le bassin du Puy.
Le seul lien qu’il y avait entre notre père et lui, c’était l’alcool. Ils n’étaient pas amis.
Le directeur d’enquête a été interrogé sur l’hypothèse qu’Éric Guerdner soit devenu « le souffre douleur, séquestré » du locataire de l’appartement et de son clan. La nièce de cet homme avait livré des détails sordides au moment des faits. Elle disait avoir été témoin de coups portés par le fils. « Éric se laissait faire, il n’arrivait pas se défendre. » Des violences auraient été commises avec une fourchette, d’autres situations avaient pour but de l’humilier. « On lui faisait sniffer ses anxiolytiques écrasés en lui faisant croire que c’était de la cocaïne », illustre l’avocate des parties civiles Me Christelle Dursac. « D’autres faits plus graves ont été rapportés, confirme le major de la gendarmerie. Mais ils n’ont jamais été confirmés. » L’enquête qui avait été ouverte en parallèle a finalement été classée sans suite.Le principal intéressé, témoin clé, a été localisé, lundi soir, à Clermont-Ferrand. Il s’est présenté au Palais de justice hier en début d’après-midi. À présent âgé de 51 ans, son élocution peu audible et son incompréhension de la plupart des questions n’ont pas permis d’en apprendre beaucoup plus. Il a maintenu ses premières déclarations, quand bien même les expertises scientifiques rendent certains détails impossibles. « Vous dites que vous lui avez donné un Efferalgan après avoir été frappé par l’accusé, mais il n’y avait pas de molécule de paracétamol dans son sang », relève la présidente Hélène Moreau. « Vous dites aussi avoir nettoyé son visage le soir, avec un gant de toilette, mais le légiste indique que la figure a été nettoyée post mortem. »Les expertises scientifiques ont apporté une seule certitude : toutes les projections de gouttes de sang retrouvées sur les murs de la chambre, et sur les meubles du salon et de la cuisine appartiennent à l’accusé uniquement. Le doute reste entier en revanche concernant la présence à côté du lit de la victime d’un plateau de bois sur lequel l’ADN du locataire a été retrouvé sur trois bords et le sang de la victime sur le dernier côté.Tout au long de la journée, Eddy Cointrel a gardé la même attitude dans le box des accusés. Le visage fermé, il a fixé un point au sol. Il doit être interrogé sur les faits aujourd’hui, juste avant les réquisitions et la plaidoirie de l’avocate générale. Le verdict est attendu en soirée.
Céline Demars