Une artiste veut donner une nouvelle dimension à la broderie d'art à travers ses œuvres présentées à Brioude

Ce qui me caractérise, c’est le développement d’une méthode de travail singulière et une exploration inédite de la broderie." C’est par ces mots qu’Emmanuelle Dupont présente son exposition qui se tient jusqu’au 26 octobre, à l’Hôtel de la Dentelle à Brioude.

Diplômée des métiers d’art, l’artiste a voulu insuffler un vent nouveau à la broderie, en l’élevant au statut d’œuvre d’art à part entière. En élaborant des techniques innovantes d’hybridation de matières :

" Pour moi la broderie est une discipline très précise et méticuleuse. Je me la suis approprié pour développer un univers artistique où je détourne la broderie de son carcan traditionnel un peu bienfaisant "

Le tout au service d’un monde personnel tournant autour du végétal, de l’animal, de la mythologie, des espèces…Le choix des matériaux répond aussi à une certaine forme de logique. Elle utilise par exemple de la mue de serpent, de la peau de galuchat, le tout relié par une dentelle à l’aiguille sur une mousseline de soie : " je choisis des matériaux qui donnent du sens à ce que je fais. C’est indispensable. "Un col méduse

Là où la soixantaine d’œuvre exposée se démarque de la broderie dite traditionnelle, c’est sur la notion de temps nécessaire pour penser et élaborer une œuvre : " C’est inhérent à mon travail, comme à celui des dentellières. Certains travaillent avec des matériaux plus robustes mais moi je travaille avec des choses très fines comme des aiguilles, du fil à gants, des microperles. C’est cette finesse qui m’aide à avoir le plus de détails et donc cet effet trompe-l’œil que je recherche souvent. " 

La recherche du détail et de la précision implique un temps plus long pouvant s’avérer nécessaire dans le processus artistique : 

" C’est un temps qui est nécessaire à la réflexion, à la respiration… Dans nos sociétés où tout repose sur l’immédiateté, le rapport au temps n’est pas perçu comme quelque chose de constructif, c’est vraiment dommage… " 

C’est l’histoire d’une sculpture textile entièrement réalisée à la main et brodée à l’aiguille :

" C’est une pièce hybride entre  l’orchidée et le papillon. J’ai utilisé des ailes de papillon pour donner du sens à la broderie. Et pour le côté hybride, j’ai utilisé une tête et des élytres de scarabée " 

L’œuvre a nécessité environ 200 heures de travail. Pourquoi avoir choisi l’orchidée ? " C’est l’espèce de plante qui s’hybride le plus. Il y a tout ce côté mimétisme dans la nature qui me fascine. " L'orchidée papillon, l'œuvre qui a permis à Emmanuelle Dupont de recevoir le prix Liliane Bettencourt en 2008 - Photo J.V

L’artiste ne réfléchit pas forcément ses pièces avant de se lancer :

" Il y a quelque chose de très spontané. C’est la recherche de la forme et de la matière qui m’inspire avant tout et je suis moi-même étonnée de la forme que prennent mes pièces. "

Jérémy Virot